Volume 40 - numÉro 10 - 7 novembre 2005 |
|
||
année internationale de la physiqueUn FaNTOmM à la recherche de la matière sombre…
Même si l’Halloween est passée, sachez qu’il existe à l’Université de Montréal depuis quatre ans déjà un FaNTOmM qui n’a d’yeux que pour le côté sombre des galaxies! Aussi curieux que cela puisse paraitre, même si la matière sombre n’émet aucun rayonnement détectable, il faut faire appel à des instruments de plus en plus sensibles à la lumière visible pour en mesurer la distribution. Tel que nous l’apprenait une autre chronique de cette série («PICASSO à la recherche de la matière sombre de l’Univers», Forum du 30 mai 2005), 90% de la matière dans l’Univers est sombre et celle-ci se trouve en grande partie dans le halo des galaxies (comme la Voie lactée). Pour connaitre la quantité et la distribution de cette matière, on peut étudier la rotation des galaxies. Une galaxie, en effet, est un système comprenant des milliards d’étoiles en équilibre, c’est-à-dire qu’elle n’est ni en contraction ni en expansion. Si ces étoiles étaient immobiles, la gravité les ferait tomber les unes sur les autres. C’est la rotation qui empêche que cela se produise, tout comme on est poussé vers l’extérieur lorsqu’on prend un virage trop rapidement en voiture. La vitesse de rotation en un point de la galaxie est une mesure de toute la masse contenue dans l’orbite passant par ce point, qu’elle émette un rayonnement ou pas. En obtenant des cartes des vitesses de rotation, comme le montre le graphique pour la galaxie NGC 4321, il est possible de déterminer la loi de rotation, et donc la distribution de la matière, en fonction de la distance par rapport au centre de la galaxie. Une étude de la lumière émise par la galaxie avec un télescope optique permet ensuite d’estimer la distribution des étoiles; de même, on peut trouver la distribution du gaz (principalement de l’hydrogène neutre) à l’aide d’un radiotélescope. En soustrayant ces deux masses, celle des étoiles et celle du gaz de la masse totale obtenue par la courbe de rotation, on parvient finalement à une mesure de la masse sombre dans cette galaxie. CQFD! Bien que la méthode employée basée sur l’effet Doppler – celui-là même qui est responsable du changement de ton d’une sirène d’ambulance lorsqu’elle s’approche, puis lorsqu’elle s’éloigne – pour déterminer les vitesses de rotation soit très simple, le signal (qui a parcouru des millions d’années-lumière) est excessivement faible, à un point tel qu’il se perd dans le bruit de l’électronique des détecteurs! Il faut plutôt utiliser, pour cette tâche délicate, une caméra à «comptage de photons». C’est ainsi qu’est né à l’Université de Montréal le projet FaNTOmM (Fabry-Perot de nouvelle technologie pour l’observatoire du Mont-Mégantic [OMM]; pour plus d’information, consultez le site <www.astro.umontreal. ca/fantomm/>). Mais quel est le secret de ce FaNTOmM qui ne fait pas de bruit? Il n’est pas compliqué: un tube amplificateur placé devant le détecteur fait en sorte que le faible signal d’un photon se transforme en plusieurs millions d’électrons qui, eux, ne passent pas inaperçus! FaNTOmM est actuellement la caméra à comptage de photons la plus sensible du monde avec une «efficacité quantique» d’environ 30%, c’est-à-dire que 30% des photons incidents sont détectés, comparativement à 4 ou 5% pour les instruments qui l’ont précédé. Depuis sa mise en service, FaNTOmM s’est avéré l’un des appareils les plus performants de l’OMM… et il hante aussi à l’occasion les observatoires Canada-France-Hawaii et ESO/ La Silla au Chili. Cette année seulement, les champs des vitesses d’environ 90 galaxies ont été déterminés. Bien que FaNTOmM soit très performant, les chercheurs du Laboratoire d’astrophysique expérimentale (LAE) du Département de physique cherchent à mettre au point FaNTOmM II, lequel devrait avoir une efficacité supérieure à 80%. Cette fois, l’amplification se fera dans les registres mêmes du détecteur. Comme la matière sombre reste difficile à détecter, les moyens déployés pour la trouver continuent à se développer, grâce autant aux astronomes du LAE qu’aux physiciens des particules du projet PICASSO; on commence à voir la lumière au bout du tunnel! Claude Carignan |
Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.