Volume 40 - numÉro 17 - 23 janvier 2006 |
|
||
L’hypertension fait vieillir les artèresLa rigidité et la calcification des gros vaisseaux causent des changements de pression et beaucoup de dommages aux organes cibles
Un milliard de personnes souffrent d’hypertension dans le monde. Mais, à cause du vieillissement de la population et de l’évolution des modes de vie, qui favorisent l’obésité et la sédentarité, on s’attend à ce que ce nombre monte en flèche. On comptera, selon les estimations des spécialistes, plus de 1,5 milliard de malades d’ici 2025. Et le Canada ne sera pas épargné par le phénomène. «Actuellement, plus de une personne sur cinq au pays fait de la haute pression, soit 4,1 millions de Canadiens de 18 ans et plus. À 65 ans, c’est environ la moitié des adultes qui sont affectés par cette maladie», indique Pierre Moreau. Ce qui inquiète le plus ce professeur de la Faculté de pharmacie et spécialiste de l’hypertension artérielle, c’est que près de la moitié d’entre eux ne sont même pas conscients de leur état. Dans les faits, 43% des hypertendus ignorent l’être et à peine 16% sont traités et ont une tension artérielle bien maitrisée. «Souvent, les gens atteints n’ont aucun symptôme, affirme M. Moreau. Cela en fait une maladie sournoise et lourde de conséquences.» Selon l’Organisation mondiale de la santé, c’est un des facteurs majeurs contribuant au fardeau global des maladies sur la planète. Première cause de l’accident cérébrovasculaire, l’hypertension accroit de façon sérieuse les risques de maladie cardiovasculaire et d’insuffisance rénale. «L’hypertension entraine d’autres complications, notamment les infarctus et l’insuffisance cardiaque», signale le directeur du Laboratoire de pharmacologie vasculaire. L’hypertension fait vieillir les artèresL’hypertension produit des modifications de structure qui ne sont pas les mêmes selon que les artères sont petites ou grandes. La différence, précise le chercheur, pourrait s’expliquer par le fait que les petites artères se contractent pour contribuer à l’élévation de la pression. «C’est ce qu’on appelle la vasoconstriction, dit-il. Malheureusement, lorsque la pression sanguine reste élevée pendant de longues périodes, la vasoconstriction devient permanente.» Les mécanismes menant à ce processus, qui a pour effet de limiter l’apport de sang aux organes vitaux tels que le cœur, le cerveau et les reins, sont pour l’instant peu connus. Dans un article récent de la revue Circulation, Pierre Moreau présente des données sur les modifications dans la structure des gros vaisseaux sanguins soumis à un vieillissement accéléré. Sa recherche menée sur des rats démontre qu’une enzyme de la famille de l’anhydrase carbonique permet de dissoudre les dépôts de calcium accumulés dans les grosses artères. «L’anhydrase carbonique est une enzyme normalement active dans la dégradation des os, explique le professeur. À ce jour, on croyait que le processus de calcification des artères était irréversible.» La découverte revêt une grande importance, comme le souligne le spécialiste. «C’est la rigidité et la calcification des gros vaisseaux qui causent des changements de pression et des dommages aux organes cibles chez les personnes âgées», fait-il remarquer. Parallèlement à ses travaux effectués au Laboratoire de pharmacologie vasculaire, M. Moreau travaille activement au sein du Groupe de recherche universitaire sur le médicament (GRUM), un regroupement de chercheurs issus du Département de chimie et des facultés de médecine et de pharmacie qu’il codirige avec un collègue de l’Université, Michel Bouvier. L’une des missions du GRUM est de favoriser la recherche multidisciplinaire pour stimuler la mise au point de nouveaux médicaments. Les récentes recherches du professeur Moreau sur les changements provoqués par le remodelage des vaisseaux sanguins seront mises à profit pour tenter de mieux cibler les molécules thérapeutiques et, possiblement, en tirer de nouveaux médicaments. «Une meilleure connaissance du processus de changement dans la structure des petites et des grosses artères ne pourra qu’aider le corps médical à mieux utiliser les médicaments antihypertenseurs et à imaginer de nouvelles façons de combattre l’hypertension et ses complications», conclut Pierre Moreau. Dominique Nancy Voir aussi : Qu’est-ce que la pression artérielle? |
Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.