Un philosophe, ça fait quoi au juste?

Une nouvelle collection vise à faire connaitre les professions intellectuelles au public

«Nul ne peut prétendre maitriser la langue dans son immensité, dans sa mouvance», prévient Marie-Éva de Villers dans son ouvrage sur la lexicographie.

Afin de faire la lumière sur le rôle, souvent méconnu, des universitaires, Les Presses de l’Université de Montréal (PUM) inaugurent, en collaboration avec Les Belles Soirées, une nouvelle collection intitulée Profession. Les trois premiers ouvrages, lancés le 2 mars, s’intéressent à l’astronome, au lexicographe et au philosophe.

«Notre travail est de publier des livres savants, mais en même temps nous avons une mission de vulgarisation afin que le savoir puisse circuler. Nous avons eu l’idée de faire connaitre le métier des universitaires, discipline par discipline», mentionne Benoît Melançon qui dirige le projet avec Florence Noyer, éditrice déléguée aux PUM.

Ce dernier, professeur au Département d’études françaises et directeur scientifique des PUM, se rappelle le commentaire du comédien Pierre Curzi dont le personnage de professeur d’histoire dans Le déclin de l’Empire américain confiait à ses amis: «Vous êtes ma seule famille, ma mère ne sait pas ce que je fais.»

«Nous désirons expliquer, concrètement, ce que font les universitaires», résume-t-il.

La formule retenue est la suivante: les directeurs des PUM demandent à un professeur de parler de son travail. Ils choisissent «des gens qui sont suffisamment avancés dans leur carrière pour avoir un certain recul».

Le 2 mars, trois ouvrages seront donc présentés. François Wesemael traitera d’astronomie, Marie-Éva de Villers de lexicographie et Michel Seymour de philosophie. Ce même jeudi en soirée, Mme de Villers livrera l’essentiel de ses réflexions au public des Belles Soirées.

Même si chaque professeur a reçu des directives quant à la façon de rendre son propos, la facture de chacun des trois ouvrages est très différente et M. Melançon se réjouit de cela. Par exemple, Michel Seymour a adopté un ton beaucoup plus personnel que les deux autres. Mais chaque livre, s’il est susceptible d’intéresser le grand public, devrait aussi éclairer les chercheurs des autres départements sur le travail de tel ou tel collègue. Des exemples? Michel Seymour signale que ses interlocuteurs communiquent presque tous en anglais, ce qui crée une situation particulière; M. Wesemael nous apprend que, dans son domaine, la publication numérique est devenue la norme; et Mme de Villers, qui possède une longue expérience dans l’élaboration de dictionnaires, s’interroge sur le rôle du lexicographe dans la société, sur ce qu’il convient de donner comme information lexicale.

Les ouvrages, on s’en doute, donneront aussi l’occasion de repousser quelques idées reçues. Ainsi, l’astronome en 2006 n’a pas l’œil collé sur l’oculaire du télescope à longueur de journée. C’est fini, cette époque!

«Les volumes permettront d’aller à la rencontre ou à l’encontre de l’imaginaire», dit M. Melançon.

Le scénario idéal de Mme Noyer, éditrice déléguée, et de M. Melançon prévoit la publication d’une trentaine de livres, à raison de six ou sept par année. Les deux prochains, vraisemblablement lancés à l’automne, porteront la signature de Jean Proulx, directeur du Département de criminologie, et de Daniel Weinstock, directeur du Centre de recherche en éthique de l’Université. Le premier causera criminologie, le second éthique.

Paule des Rivières