Volume 41 - numÉro 4 - 18 septembre 2006
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«T’es pas ma mère»Entre les belles-mères et les beaux-enfants, la paix reste précaire
Même si la nouvelle conjointe du père a su établir une complicité avec son beau-fils ou sa belle-fille, l’adolescence amène son lot de difficultés. «Inévitablement, il y aura des conflits, particulièrement avec les jeunes filles.» Voilà la morose découverte qu’a faite Julie Gosselin, qui consacre ses travaux de doctorat à désigner les facteurs facilitant l’intégration des belles-mères au sein de familles recomposées où vivent des adolescents. Sous la direction d’Hélène David, professeure au Département de psychologie, l’étudiante a enquêté auprès de plus d’une centaine de belles-mères, de beaux-pères et d’enfants âgés de 12 à 18 ans membres de familles recomposées et a recueilli leurs propos. Il s’agit de l’une des rares études empiriques qui ne se limite pas à un seul répondant par famille et qui permet de comparer la situation des belles-mères et des beaux-pères. La recherche, qui a été accueillie avec un vif intérêt par les spécialistes, a valu à la chercheuse le prix de la meilleure affiche pour sa présentation au congrès international de l’American Psychology Association. Ce congrès s’est déroulé à La Nouvelle-Orléans en aout dernier. L’ambigüité du rôle de la belle-mèreIl est ardu de tracer un portrait précis de la famille recomposée, tient à préciser Julie Gosselin, puisque les familles ne sont pas toutes du même type. «Les enjeux sont très différents, signale-t-elle, selon qu’il s’agit d’une famille recomposée simple, c’est-à-dire dont un seul des ex-conjoints est en relation avec un partenaire qui est aussi parent, ou complexe, quand les deux ex-conjoints ont de nouveaux conjoints qui sont eux-mêmes parents.» Mais selon les travaux les plus récents sur le sujet, la difficulté liée à l’intégration de la belle-mère dans la famille recomposée, en particulier dans l’établissement d’une relation satisfaisante avec sa belle-fille, serait due à l’ambigüité de son rôle et des frontières au sein de la famille. «Les contacts non fréquents ou non existants entre la belle-mère et ses beaux-enfants, la complexité de la famille recomposée, la durée de la nouvelle union conjugale, ainsi que l’âge de l’enfant contribueraient à l’accentuation de cette ambigüité», explique la chercheuse.
L’adolescence augmenterait en outre le risque de situations conflictuelles. «À cet âge, les priorités sont divergentes, rappelle-t-elle. Alors que les parents essaient d’assurer une cohésion familiale, les enfants, eux, veulent prendre leur envol. Bref, c’est comme dans une famille nucléaire, dit-elle. Sauf que la situation de recomposition peut décupler cet enjeu.» Bouc émissairePour ajouter à la difficulté, la belle-mère incarne facilement aux yeux de l’enfant la «mauvaise mère» ou la marâtre, comme on l’appelait autrefois, celle sur laquelle il pourra déverser tout ce qu’il ne peut exprimer à sa mère biologique. «C’est le bouc émissaire idéal», souligne Julie Gosselin. Les témoignages qu’elle a obtenus jusqu’ici ne révèlent toutefois aucun problème majeur de ce côté, mentionne-t-elle. Mais lorsque des tensions surgissent au sein de la famille recomposée, les belles-mères se sentent rejetées, éprouvent un sentiment de détresse et vivent de l’insatisfaction conjugale. L’une des principales causes de ce désarroi serait associée à l’attitude du compagnon, qui a tendance à ne pas reconnaitre pleinement le rôle de la belle-mère et à nier le caractère stressant de la situation. «Étrangement, plus le niveau de détresse psychologique du père est bas, plus la belle-mère vit des problèmes d’adaptation et des conflits avec les enfants, montre l’étude de Julie Gosselin. La chercheuse n’hésite pas à voir un lien significatif entre ces deux variables. Pour surmonter l’hostilité de l’enfant et créer une relation de complicité, la belle-mère a besoin du père, selon Julie Gosselin. Pour l’étudiante et sa directrice, qui signent conjointement un article sur ce thème, il apparait donc important que le père prenne sa place d’homme et de père. «Il est en effet le seul qui puisse conférer une légitimité à la belle-mère et définir son rôle auprès des enfants», conclut-elle. Dominique Nancy L’arrivée d’un enfant issu du couple facilite l’intégration de la belle-mère |
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