Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 19 - 5 FÉVRIER 2007
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 Archives de Forum

capsule science

Les dispositions pour la musique sont-elles innées ou acquises?

Innées ou acquises, les dispositions pour la musique? Depuis des années, les spécialistes débattent la question. Selon la neuropsychologue Isabelle Peretz, les mécanismes à la base de la compréhension de la musique seraient innés et leur développement serait marqué par l’éducation ou la culture. «Toutefois, il arrive que certaines personnes naissent privées de ces composantes du cerveau qui nous font apprécier la musique. C’est le cas des gens qui sont atteints d’amusie congénitale.»

Selon la littérature scientifique, environ cinq pour cent de la population est amusique. Ces hommes et ces femmes intéressent particulièrement les chercheurs du Laboratoire de neuropsychologie de la musique et de la cognition auditive de l’Université de Montréal, dirigé par Mme Peretz. Avec Robert Zatorre, de l’Université McGill, elle a créé en 2005 le Laboratoire international de recherche sur le cerveau, la musique et le son, qui loge à l’UdeM. «Pour les gens qui souffrent d’amusie, le rythme, la mélodie, les accords n’ont pas de sens, explique la professeure. Ce ne sont que des bruits qui causent du stress. Ce qui est fascinant dans leur cas, c’est que le langage n’est pas touché. Cela implique qu’il y a dans le cerveau une région propre à la perception musicale.»

Alors qu’on a longtemps cru que l’amusie était associée à une difficulté d’apprentissage, les travaux d’Isabelle Peretz ont montré que la source du problème était neurologique. Le trouble résulte probablement d’une mauvaise «connexion» du cortex auditif et de ses projections dans le lobe frontal droit. «L’amusie congénitale est héréditaire, souligne la chercheuse. Environ la moitié des frères et sœurs des amusiques souffrent d’une déficience semblable. Il y a donc espoir de trouver les gènes qui président à cette transmission et de découvrir les "gènes de la musique".»

 «Les poupons sont extrêmement sensibles à la musique, rappelle Mme Peretz. Des chercheurs ont d’ailleurs constaté que les bébés de six mois perçoivent de manière plus fine que les adultes les changements de hauteur d’une mélodie que nous nommons “les pitchs”.» Certains spécialistes vont plus loin: les enfants auraient un sens musical inné très aiguisé qui s’amenuise à mesure qu’ils vieillissent.

Cette hypothèse a été confirmée en 1998 par des chercheurs qui se sont demandé si l’apprentissage de la musique devenait plus difficile, comme celui d’une deuxième langue, à un certain âge. La réponse est oui et il semble que cet âge critique soit le même dans les deux cas: six ans. Les auteurs ont soumis quatre enfants de trois et quatre ans, quatre autres de cinq et six ans et huit adultes à un même entrainement, soit six séances de 10 essais, pour leur apprendre à repérer le sol parmi sept notes jouées à intervalles séparés. Les enfants de cinq et six ans ont obtenu le meilleur résultat: de 80 à 100 % de succès à la dernière séance; ceux de trois et quatre ans ont réussi dans une proportion de 30 à 60 % et les adultes dans une proportion de 10 à 100 %. Tous, sauf un, ont progressé, ce qui prouve que l’entrainement joue un rôle dans l’apprentissage musical. Toutefois, de grandes différences entre les sujets laissent entendre que le don inné interviendrait aussi.

Ceux qui considèrent que les œuvres de Mozart ne sont que cacophonie ont donc un peu d’espoir…

Dominique Nancy et Mathieu-Robert Sauvé

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