Volume 41 - numÉro 20 - 12 FÉVRIER 2007
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Trop de jeunes suspendent leur traitement aux antidépresseursYola Moride étudie la dépression chez les patients de divers groupes d’âge
Bon nombre d’enfants et d’adolescents suspendent leur traitement aux antidépresseurs avant la fin de la période prescrite de six mois. «Ils ont tort, estime Yola Moride, professeure à la Faculté de pharmacie. Lorsque la durée des traitements est trop courte, les effets indésirables peuvent se manifester sans les bienfaits.» Depuis cinq ans, la chercheuse mène des travaux sur les personnes d’âge mineur qui souffrent de troubles dépressifs, de troubles anxieux, d’énurésie, de boulimie, d’hyperactivité ou de toute autre maladie traitée par les antidépresseurs. Grâce aux données de la Régie de l’assurance maladie du Québec et du ministère de la Santé et des Services sociaux, elle a recueilli de l’information sur plus de 5000 enfants et 11 000 adolescents âgés de 2 à 19 ans auxquels on a prescrit des médicaments de 1997 à 2005. Cet échantillon est le plus vaste à avoir été constitué à ce jour auprès des jeunes Québécois. «La littérature scientifique sur les risques et les effets bénéfiques des antidépresseurs chez les enfants et les adolescents est rare, signale Mme Moride. Cela s’explique: les recherches cliniques qui accompagnent la mise en marché des médicaments excluent généralement ces sujets. C’est pourquoi nos connaissances sont très limitées.»
20 ans de Prozac «L’usage de ces substances est recommandé pour le traitement de la dépression de modérée à grave dans cette population malgré les diverses mises en garde des agences de règlementation sur les possibles effets indésirables préoccupants, y compris l’apparition de comportements agressifs ou suicidaires», précise Yola Moride, qui s’est récemment vu accorder un financement de 71 298 $ des Instituts de recherche en santé du Canada pour son étude sur la prise d’antidépresseurs chez les enfants et les adolescents. Des résultats préliminaires obtenus avec la collaboration de la psychiatre Marie Tournier, chercheuse postdoctorale au laboratoire de Mme Moride, démontrent que la situation est aussi accablante chez les jeunes que chez les adultes et les ainés, qui ont fait l’objet d’une analyse similaire l’année dernière par la professeure Moride. «Plus de 50 % des traitements aux antidépresseurs ont une durée insuffisante. C’est particulièrement alarmant compte tenu des risques considérables de rechute», déplore la professeure, qui se demande si les diagnostics sont bons et les traitements toujours appropriés. «Il semble en tout cas qu’il y ait un manque de suivi médical, car beaucoup de ces patients ne retournent pas voir leur médecin après la suspension du traitement», dit-elle.
Quatre types Un tiers des enfants ont été traités par des IRSN et la moitié par des antidépresseurs tricycliques. Plus de 58 % des adolescents (15-19 ans) ont reçu pour leur part un ISRS et seulement 20 % un tricyclique. Selon les données recueillies par Mme Moride, les médecins généralistes sont de loin les principaux prescripteurs d’antidépresseurs chez les adolescents. Chez les enfants, un tiers des ordonnances proviennent de médecins généralistes et de psychiatres, et 20 % sont faites par des pédiatres. Seulement 60 % des enfants âgés de 2 à 14 ans ont reçu un diagnostic psychiatrique pouvant justifier un traitement aux antidépresseurs. Par ailleurs, Yola Moride s’intéresse à l’usage des antidépresseurs dans différents groupes d’âge. Un programme de gestion thérapeutique auprès des adultes (de 18 à 64 ans) est actuellement en cours grâce à une subvention de 255 000 $ du Groupe de recherche en gestion thérapeutique de la Faculté de médecine et de la Faculté de pharmacie. Ce projet, fondé sur des données probantes, vise à optimiser l’utilisation d’antidépresseurs et à améliorer le suivi médical pendant le traitement. Dominique Nancy |
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