Volume 41 - numÉro 21 - 19 FÉVRIER 2007
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capsule scienceD’où vient l’interdiction de manger du porc?
On apprenait, il y a quelques semaines, que les garderies de la Commission scolaire de Montréal ont banni le porc des menus destinés aux enfants. La raison? Il devenait trop difficile de gérer les repas s’il fallait accommoder les juifs et les musulmans de stricte observance qui refusent toute consommation de porc, animal considéré comme impur. Plusieurs associent ce rejet du porc à son apparente malpropreté. Cette justification ne tient pas la route quand on considère les conditions hygiéniques dans lesquelles vivent d’autres animaux, comme la chèvre ou la vache, qui ne font pas l’objet d’interdits religieux. L’hypothèse de l’hygiène perd tout fondement lorsqu’on remonte à la source biblique de l’interdiction, soit le Lévitique et le Deutéronome, où le porc figure parmi une vingtaine d’autres animaux qui ne doivent pas être consommés. La liste va du lièvre jusqu’à l’aigle en passant par l’autruche et la grenouille. Il est en fait défendu de manger tout animal dont le sabot est fendu mais qui ne rumine pas, tout animal qui rumine mais dont le sabot n’est pas fendu, tout ce qui vit dans l’eau mais qui n’a pas de nageoires ou d’écailles, tout oiseau qui n’est pas granivore, tout reptile et tout insecte, sauf la sauterelle. Ils sont tous qualifiés d’impurs. Le porc n’est qu’un exemple parmi d’autres d’animal dont le sabot est fendu mais qui n’est pas un ruminant.
Prototype pur C’est aussi l’explication que privilégie Jean Duhaime, professeur et doyen de la Faculté de théologie et de sciences des religions. «Les règles alimentaires structurent et renforcent l’identité d’un groupe, observe-t-il. Tout groupe se perçoit comme étant distinct et veut éviter sa dissolution. Pour cela, il doit empêcher les “mélanges”. Si cette règle vaut pour les humains, elle vaut aussi pour les animaux; ceux qui semblent avoir enfreint la règle sont considérés comme impurs et il faut s’en écarter», souligne le théologien en précisant l’interprétation de Mary Douglas. La tradition juive attribue le Deutéronome et le Lévitique à Moïse, dont l’existence, non attestée, remonterait au 13e siècle avant notre ère. Toutefois, la rédaction de ces livres date des 5e et 6e siècles avant Jésus-Christ.
L’accommodement de Paul Toute nouvelle religion étant faite de syncrétisme, cet «accommodement raisonnable», le premier de l’histoire du christianisme, a sans doute favorisé l’expansion de cette nouvelle religion. Les interdits alimentaires de la loi juive constituent, en définitive, un excellent exemple de ce qui, en psychologie développementale, est appelé la «perception essentialiste»: l’être humain, dès les premières années de la vie, perçoit les êtres et les objets comme s’ils avaient une essence interne qui les distingue. Ce processus cognitif est manifestement à l’œuvre dans les fonctions de catégorisation sociale, qui nous amènent à classer les personnes en fonction de similitudes réelles ou imaginaires. Daniel Baril |
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