Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 24 - 19 MARS 2007
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Un antibiotique pourrait réduire les troubles anxieux

Parmi ses nombreux projets de recherche sur le stress post-traumatique, Stéphane Guay veut tester l’effet d’un antibiotique combiné avec la psychothérapie

Vaincre la dépression n’est pas chose aisée. Mais les recherches sur cette maladie ouvrent de nouvelles avenues. Par exemple, la prise d’antibiotiques pourrait soulager certaines formes de maladie mentale.

Traiter des phobies et des troubles anxieux à l’aide d’un antibiotique! Aussi surprenant que cela puisse paraitre, c’est la piste de recherche sur laquelle s’est engagé Stéphane Guay, chercheur au Département de psychiatrie de la Faculté de médecine.

Spécialiste du trouble de stress post-traumatique (TSPT), Stéphane Guay poursuit plusieurs travaux sur le traitement psychothérapeutique de cette forme d’anxiété au Centre d’étude sur le trauma. Il s’agit d’une nouvelle unité du Centre de recherche Fernand-Seguin dont il est le directeur.

«Mais l’antibiotique pris seul n’a pas plus d’effet qu’un placébo, précise le chercheur. Ce n’est que combiné avec une psychothérapie cognitivo-comportementale que son efficacité sur la diminution de la peur est observée.»

Libération de glutamate
L’antibiotique en question est la D-Cyclosérine, un médicament utilisé dans la lutte contre la tuberculose. Des travaux réalisés aux États-Unis ont montré que ce médicament accentuait l’effet de la thérapie dans le traitement des troubles anxieux associés à la phobie des hauteurs et à la phobie sociale. D’autres études effectuées sur des animaux ont aussi montré que la D-Cyclosérine entrainait une baisse notable de la peur.

Stéphane Guay espère obtenir les mêmes effets bénéfiques dans le traitement du TSPT, ce qui n’a jamais été tenté jusqu’ici. Il estime qu’une augmentation des retombées de la thérapie pourrait être observée non seulement sur le plan des symptômes du stress, mais également pour ce qui est des troubles comorbides, comme l’anxiété et la dépression, ainsi que de la qualité de vie.

Comment un antibiotique peut-il opérer une telle action? «La D-Cyclosérine augmenterait la libération du glutamate, un neurotransmetteur qui favorise l’apprentissage et la mémorisation et atténue le sentiment de peur chez les personnes aux prises avec des troubles anxieux», répond Stéphane Guay.

Utilisé comme adjuvant de la psychothérapie, l’antibiotique est administré uniquement lors des séances de thérapie, soit une fois par semaine pendant 12 ou 16 semaines, à raison d’une concentration 10 fois moins forte que celle employée pour combattre une infection bactérienne. À cette concentration, il n’y aurait aucun risque de manifester une tolérance à l’antibiotique, assure le chercheur.

«Cette recherche est très prometteuse puisqu’il n’y a aucun effet secondaire associé à la D-Cyclosérine et aucune interaction nécessitant d’interrompre une médication. Il n’y a pas non plus de contre-indication à se servir d’un placébo étant donné que nous assurons aux participants le meilleur traitement actuellement reconnu pour soigner le stress post-traumatique, soit la thérapie cognitive comportementale.»

Stéphane Guay

Stéphane Guay

L’aide du conjoint
Une autre recherche de Stéphane Guay sur le traitement du TSPT a révélé une incidence positive liée à la présence d’un conjoint dans la démarche thérapeutique. Pour s’assurer que le conjoint ou la conjointe agirait adéquatement, on a demandé à cette personne de participer à deux séances d’information sur la démarche cognitivo-comportementale et sur le rôle qu’elle aurait à jouer.

Dans ces conditions, les résultats de la thérapie ont été significativement plus élevés que dans les cas où la victime était seule. Lorsque celle-ci était accompagnée d’un proche qui n’était pas un conjoint (un frère ou un ami par exemple), les résultats n’étaient pas supérieurs à ceux de la thérapie sans accompagnement.

Selon Stéphane Guay, l’effet supérieur dans le cas d’un accompagnement par un conjoint serait attribuable à la proximité des deux membres d’un couple et au fait qu’ils partagent l’essentiel de la vie quotidienne. Dans les échanges entre les participants à cette recherche, Stéphane Guay a pu noter que les conjoints discutaient beaucoup plus facilement du traumatisme que ceux qui ne formaient pas un couple et qui n’avaient que peu de choses à se dire.

«La présence du conjoint pallie le manque de soutien social, qui est l’un des plus importants éléments prédictifs de maintien et de développement du stress post-traumatique», affirme Stéphane Guay. Ses conclusions l’amènent à inciter les psychologues à inclure les conjoints dans les thérapies du TSPT.

Le directeur du Centre d’étude sur le trauma continue ses travaux dans le domaine et mesurera cette fois les répercussions physiologiques que l’attitude du conjoint engendre chez la victime du TSPT.

«Dans ce type de thérapie, il est primordial de ne pas bousculer ou critiquer la victime, souligne le chercheur. Nous voulons voir si les attitudes négatives s’accompagnent d’une réactivité en ce qui concerne le rythme cardiaque et la tension musculaire du sujet.»
Cette étude sera menée auprès de gens atteints de TSPT, de trouble obsessif compulsif ou de trouble panique avec agoraphobie. Toute personne ayant reçu l’un de ces diagnostics et qui souhaiterait prendre part à ces travaux peut obtenir plus d’information en consultant le site du Centre d’étude sur le trauma (www.hlhl.qc.ca/crfs/trauma) ou en composant le 514 251-4000, poste 3574.

Daniel Baril

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