Volume 41 - numÉro 28 - 23 avril 2007
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Les directeurs d’école ne s’écroulent pas tous sous la pressionRoseline Garon étudie la résilience des chefs d’établissements scolaires
Gérer des enseignants débordés, respecter des budgets serrés, élaborer des stratégies de lutte contre le décrochage scolaire, s’attaquer à la violence à l’école et à la consommation de drogue... Voilà le pain quotidien des directeurs d’écoles primaires et secondaires au Québec. «Les commissions scolaires ont de plus en plus de mal à recruter des personnes prêtes à diriger des écoles, mentionne Roseline Garon. On comprend pourquoi: c’est un emploi très exigeant qui demande des qualités humaines particulières.» Mme Garon, professeure au Département d’administration de l’éducation et fondements de l’éducation à la Faculté des sciences de l’éducation, estime que les directeurs d’école devraient être nommés en fonction de leur capacité de «résilience». «La résilience, rappelle-t-elle, est un concept emprunté à la physique des matériaux voulant qu’un métal retrouve sa forme après avoir subi un stress.» En psychologie, la résilience est définie comme l’aptitude des individus à vaincre l’adversité et même à sortir plus forts de situations éprouvantes. Popularisée par l’éthologue Boris Cyrulnik, la résilience s’applique souvent aux enfants issus de milieux difficiles qui deviennent des adultes sains d’esprit et parfaitement adaptés à la vie en société. «Une personne insensible aux problèmes et qui voit le monde s’écrouler autour d’elle sans en être affectée n’est pas résiliente, nuance Mme Garon. C’est dans sa capacité à surmonter les obstacles qu’on peut juger de ses forces», déclare cette spécialiste de la psychologie organisationnelle. Au cours d’une recherche dont les résultats ont paru en 2006 dans Psychologie du travail et des organisations, Mme Garon a interrogé des directeurs et directeurs adjoints d’écoles de milieux défavorisés montréalais considérés comme «résilients» pour les comparer avec des «vulnérables». Leurs secrets? «Les directeurs résilients sont réalistes mais de tempérament optimiste. Ils entretiennent envers eux-mêmes un sentiment de compétence et de confiance.» De façon générale, les directeurs d’école résilients ont en commun d’accorder une grande importance à la circulation de l’information entre le personnel et la direction; à l’instauration de règles claires; à une gestion adéquate des priorités; et au maintien de bonnes relations avec les parents des élèves. Nouvelle cohorte «Dans le passé, on devenait directeur d’école après 15 ou 20 ans d’enseignement. De nos jours, ce sont souvent des jeunes qui ont moins de 10 ans d’expérience», signale Serge Morin, président de la Fédération québécoise des directeurs et directrices d’établissements d’enseignement, qui compte 2400 membres. Lui-même ancien directeur d’école dans la région de Trois-Rivières, il a vu cette profession se transformer considérablement au cours des trois dernières décennies. «L’ampleur de la tâche n’a pas cessé de croitre, dit-il pour expliquer les nombreux cas d’épuisement professionnel qui affectent les directeurs et directeurs adjoints. La semaine compte au moins 50 heures, incluant les réunions de parents et celles des différents comités. Et les directeurs travaillent l’été!» M. Morin cite l’étude d’un chargé de cours de l’Université de Sherbrooke et de l’Université du Québec en Outaouais, Réjean Fortin, auprès de 365 directeurs et directeurs adjoints, qui révèle que 7 sur 10 avaient songé à renoncer à leur choix de carrière depuis leur entrée en fonction. «Le directeur d’école est emprisonné dans une structure qui ne lui laisse pas une grande marge de manœuvre. C’est pourtant lui qu’on montre du doigt quand ça va mal!» Selon diverses études, les directeurs d’école et leurs adjoints sont soumis à des tensions professionnelles particulières. Par exemple, la Fédération des directeurs d’école de Nouvelle-Zélande annonçait en 2005 que 40 % des directeurs étaient «très stressés». Des proportions semblables ont été dévoilées aux États-Unis. «Alors que, du côté de la profession enseignante, la satisfaction au travail, le stress et l’épuisement professionnel ont été l’objet de nombreuses recherches, écrit Mme Garon, celles qui concernent les gestionnaires des écoles restent plutôt rares.»
Technique du sosie Cette approche permet de saisir ce qui préoccupe le répondant et sa façon d’aborder les situations difficiles, et de distinguer les attitudes liées aux facteurs environnementaux de celles liées aux facteurs individuels. Le directeur résilient aura tendance à faire participer son personnel à la recherche de solutions alors que le vulnérable attribuera sans cesse les problèmes de son école au fait qu’elle est située dans un quartier pauvre. Selon Mme Garon, il y aurait lieu de privilégier les sujets résilients au moment de l’embauche. «De nos jours, on recrute les directeurs dès leur cinquième année d’enseignement, et même avant. Il faudrait qu’ils sachent dans quoi ils s’embarquent.» Mathieu-Robert Sauvé |
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