Volume 41 - numÉro 30 - 22 mai 2007
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La neuro-imagerie ouvre de nouvelles perspectives en psychologie cliniqueVincent Paquette explore les possibilités du neurofeedback dans le traitement de la dépression
Les techniques d’imagerie cérébrale qui sont en train de révolutionner la recherche fondamentale en neurologie pourraient aussi transformer la psychothérapie. C’est du moins ce qu’a entrepris d’explorer Vincent Paquette, étudiant au doctorat au Département de psychologie, qui cherche à démontrer l’utilité et la pertinence de l’imagerie cérébrale dans la psychologie clinique. «Il y a un manque de dialogue et une certaine ségrégation dans les diverses approches en psychologie, déplore-t-il. On nous dit qu’il faut être formé à l’approche scientifique, mais les cliniciens s’intéressent peu aux travaux de neuropsychologie qui permettent de savoir quelles sont les zones du cerveau touchées par les troubles psychologiques.» Sous la direction du professeur Mario Beauregard, l’étudiant cherche à jeter des ponts entre les divers domaines de la psychologie en recourant à la neuro-imagerie, une voie novatrice jusqu’ici totalement inexplorée. À son avis, la neuro-imagerie permet non seulement de concevoir des modèles neurocognitifs, mais de valider les modèles tant en psychologie développementale qu’en psychologie clinique et en psychiatrie. «En fournissant une comparaison de l’activité cérébrale avant et après un traitement, l’imagerie permet de mesurer les effets d’une thérapie autant que d’une médication et de formuler des hypothèses testables, affirme-t-il. Elle pourrait même servir à désigner des marqueurs grâce auxquels on pourrait élaborer des modèles prédictifs sur les chances de réussite d’une thérapie en fonction d’un profil neurologique particulier.»
Le neurofeedback Les premières utilisations de l’EEG en thérapie remontent aux années 70 avec le biofeedback. La technique a évolué et l’on parle maintenant de «neurofeedback»: la méthode est la même et consiste à présenter au sujet une visualisation de son activité cérébrale au moment où il se concentre sur des tâches de nature thérapeutique.
Vincent Paquette a employé cette technique dans le traitement de la dépression. Chez les personnes atteintes de dépression majeure, l’imagerie cérébrale montre, en prétraitement, une hyperactivité dans le lobe fronto-temporal droit ou encore une hypoactivité dans le lobe gauche. Le traitement par neurofeedback consiste à amener le patient à induire des émotions ou des pensées qui auront un effet sur cette activité neuronale. Sur un écran d’ordinateur, le sujet observe la traduction de cette activité sous forme de deux bandes qui montent ou qui descendent selon l’intensité de l’activité locale (voir l’illustration). «Le patient doit parvenir à établir un équilibre entre les deux bandes en apprenant à maitriser ses émotions, explique le chercheur. Il apprend ainsi à faire une association entre son état mental et le contrôle de l’activité cérébrale illustrée à l’écran.»
Support visuel efficace
L’imagerie cérébrale a en effet révélé que l’activité était devenue plus intense dans le lobe gauche, exactement comme chez les sujets du groupe témoin. «Le débalancement à gauche est associé à des émotions positives comme la bonne humeur et le sourire, qui permettent d’aller à la rencontre des autres, alors que le débalancement à droite est caractéristique d’un état d’inhibition et de retenue», souligne Vincent Paquette. Le support visuel offert par le neurofeedback aurait lui-même un effet réel. «Trois personnes ont abandonné la thérapie dès le début, quand elles ont réalisé qu’elles pouvaient avoir un contrôle sur leur état émotif», souligne-t-il. Cette approche serait en outre plus efficace chez les hommes, davantage stimulés par des méthodes visuelles que langagières. Quant aux sept sujets qui n’ont pas connu d’amélioration de leur état, l’imagerie avait montré qu’ils manifestaient à la fois une hyperactivité à gauche et une hypoactivité à droite. Selon Vincent Paquette, le protocole de conditionnement des émotions pourrait être ajusté à ce type de profil, qui reflète un état émotif particulier. «La neuro-imagerie permet donc de créer des modèles neurocognitifs, de mesurer de façon objective les effets d’un traitement et de déterminer des marqueurs qui rendent possible le choix d’un bon traitement», conclut l’étudiant. Ces travaux, réalisés au Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, auquel Vincent Paquette et Mario Beauregard sont associés, constitueraient les premières véritables utilisations de l’imagerie cérébrale en psychothérapie. Daniel Baril |
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