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Denis Dubois enseigne au cégep de Bois-de-Boulogne depuis plus de 20 ans, mais il n’a jamais cessé de donner des cours à l'UdeM. |
Une dizaine d’étudiants à la maîtrise en philosophie suivent depuis le trimestre d’automne un séminaire sur l’enseignement de cette matière au collégial. Au cours de ce séminaire qui ne prendra fin qu’au printemps, les étudiants devront notamment donner deux cours devant une salle de classe remplie de cégépiens. Des jeunes qui, sauf exception, n’ont jamais entendu parler de Kant, Hegel ou Platon.
«Je n’ai jamais oublié ce que nous a dit un vieux professeur, en Europe, à propos de l’enseignement, relate d’un air amusé Denis Dubois, qui donne ce séminaire pour une deuxième année de suite. Il disait qu’on enseigne d’abord ce qu’on nous a enseigné, ensuite ce qu’on a compris durant nos études. Enfin on enseigne ce que les étudiants ont besoin d’apprendre.»
Ayant lui-même connu une période d’adaptation d’environ cinq ans avant de se sentir à son aise comme pédagogue, ce spécialiste de Kant estime que l’option «philosophie au collégial» peut permettre aux universitaires qui veulent se consacrer à ce type de carrière de gagner du temps.
L’Université forme bien les étudiants, tient à préciser ce professeur du collège de Bois-de-Boulogne, mais elle ne les forme pas nécessairement pour l’enseignement au collégial. C’est pourquoi la nouvelle option peut s’avérer utile. À son avis, la nature de la philosophie enseignée dans les cégeps est fondamentalement différente de celle qu’on apprend à maîtriser dans les universités. «À l’université, on analyse les idéologies, la pensée, l’approche des penseurs. Au collégial, les cours de philosophie visent à former des individus critiques et alertes. La philosophie y est davantage présentée comme un outil que comme un objet.»
Des postes à pourvoir
Les cégépiens doivent suivre trois cours obligatoires: Éthique et politique, Philosophie et rationalité et Diversité des conceptions de l’être humain. Or, de nombreux enseignants qui donnent ces cours depuis des années sont appelés à prendre leur retraite au cours de la prochaine décennie. C’est pourquoi le nouveau programme arrive à point.
Bien que l’option offerte ne soit pas une exigence ministérielle — l’Université de Montréal est la seule au Québec à l’offrir —, elle constitue sans conteste un atout pour le diplômé. «Les évaluations que nous avons reçu des 10 premiers étudiants sont excellentes. Quatre d’entre eux sont d’ailleurs déjà professeurs de cégep», dit Denis Dubois.
L’option, lancée à l’automne 1999, suscite un intérêt certain chez les étudiants. Pour l’an prochain, 26 candidats se sont montrés désireux de s’y inscrire. Si tous sont admis, cela doublera la cohorte de l’année 2001-2002.
M. Dubois rend d’ailleurs hommage au directeur du Département de philosophie, François Lepage, qui a été l’instigateur de cette option. «Les collèges sont les plus importants employeurs de nos diplômés à la maîtrise, dit M. Lepage. Les étudiants ne s’en cachent pas: c’est dans les cégeps qu’ils veulent travailler.»
L’option «philosophie au collégial» comporte un minimum de 21 crédits de cours du programme d’études du cycle supérieur et 24 crédits attribués à la recherche et à la rédaction d’un court mémoire. Le programme compte 6 crédits de cours obligatoires et 15 crédits de cours à option. Il donne accès au doctorat si l’étudiant désire poursuivre ses études.
Sa particularité est de comprendre un stage où l’étudiant doit lui-même préparer et donner deux cours durant l’année. Ces stages ont lieu dans l’un des trois collèges avec lesquels le Département de philosophie a établi des ententes. Il s’agit des cégeps Maisonneuve, Bois-de-Boulogne et André-Grasset.
M.-R.S.