L’arrivée de la FAS et de la FES a propulsé l’UdeM dans l’ère moderne.
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La création de la FAS fera disparaître cinq facultés qui avaient été mises sur pied en 1920, soit les facultés des lettres, de philosophie, des sciences sociales, des sciences et des arts. |
«On a changé l’Université. Voilà mis ensemble ce que tout séparait: les arts et la science.»
Cet extrait d’une brochure présentant deux nouvelles venues sur le campus, la Faculté des arts et des sciences (FAS) et la Faculté des études supérieures (FES), témoigne du changement qui s’opérait à l’Université de Montréal le 31 janvier 1972. Ce jour-là, le régime pédagogique mis en place à la création de l’Université, 50 ans plus tôt, prenait fin. En créant deux nouvelles facultés, on transfigurait tout son visage. «Une mutation capitale», dira le recteur de l’époque, Roger Gaudry.
«L’Université qui, jusqu’en 1950, avait d’abord été le lieu de regroupement d’écoles professionnelles avait conçu ses structures en fonction des besoins de ces écoles. L’imposition de la structure facultaire aux disciplines fondamentales devait fatalement créer de nombreux problèmes», peut-on lire dans un rapport du Comité de développement académique paru en 1970.
En fait, le principal problème venait non pas seulement de la formation générale mais des besoins de la société. Le marché du travail avait un besoin croissant de diplômés ayant une formation multidisciplinaire. La structure en place avait donné carte blanche à chaque faculté pour l’organisation «interne» de son enseignement. L’étudiant qui désirait poursuivre des études dans plusieurs facultés était confronté à des exigences multiples et divergentes selon les unités. Cette situation ne favorisait donc pas la formation multidisciplinaire.
Dans la foulée des manifestations étudiantes de la fin des années 60, l’Assemblée universitaire confie au Comité de développement académique le mandat de revoir les structures de l’Université. Le Comité dépose un premier rapport en juin 1969 et un second en juin 1970. Les recommandations 9 et 10 proposent de créer la Faculté des arts et des sciences et la Faculté des études supérieures.
La création de la FAS fera disparaître cinq facultés qui avaient été mises sur pied en 1920, soit les facultés des lettres, de philosophie, des sciences sociales, des sciences et des arts.
La Faculté des études supérieures, selon le recteur Gaudry, ne sera pas une faculté comme les autres, «en ce sens qu’elle ne possède pas de département ni d’école, mais qu’elle recrute ses professeurs dans toute l’Université tout en leur laissant la liberté d’œuvrer à l’intérieur des facultés et des départements».
Les étudiants non consultés
En 1969, le Comité de développement académique entame ses travaux et remet en question toutes les structures établies. On revoit les concepts de département, section, école, centre de recherche, institut, groupe de recherche, secteur d’enseignement et les types de baccalauréats de même que l’organisation de la recherche.
La réorganisation de l’enseignement aurait dû être une préoccupation centrale pour les étudiants. Mais ils ne participèrent pas aux débats. L’Association générale des étudiants de l’Université de Montréal s’était sabordée peu avant, à son congrès de février.
À l’automne 1969, lorsque le Comité de développement académique consulte la communauté universitaire après le dépôt de son premier rapport, aucune association étudiante ne produit de mémoire ou n’est invitée à rencontrer les membres du Comité.
Le Comité recommande 28 changements majeurs, dont la création d’un secteur des sciences pures et appliquées qui engloberait la Faculté des sciences, l’École d’architecture et l’Institut d’urbanisme; l’instauration d’un secteur des arts et des humanités intégrant la Faculté des lettres et la philosophie, la musique, l’École des sciences de l’éducation et la Faculté de théologie; enfin l’implantation d’un secteur du droit et des sciences sociales comprenant les facultés de droit et des sciences sociales.
Déposé le 1er juin 1969, le rapport est soumis à l’assentiment de la communauté universitaire. Du 16 juillet 1969 au 5 mars 1970, quelque 46 mémoires sont présentés et 46 entrevues sont réalisées en vue du rapport définitif. Celui-ci penchera pour une réorganisation générale des structures. Deux secteurs ne sont pas concernés par ce rapport, le secteur de la santé, déjà à l’étude, et la Faculté de l’éducation permanente.
15 réunions de l’AU
L’Assemblée universitaire (AU) approuve le projet définitif après 15 réunions. Le Conseil de l’Université, dans une session extraordinaire consacrée à cette question, crée les deux facultés le 31 janvier 1972. Il aura fallu quatre années de gestation pour chambarder l’enseignement universitaire.
Au cours des 50 premières années de son existence, l’Université s’était efforcée de former des prêtres, des médecins et des chercheurs. Mais elle avait aussi assuré l’enseignement ménager (écoles ménagères), la formation des maîtres (écoles normales), des spécialistes du tourisme (École de tourisme) et des musiciens (Faculté de musique) de même que l’enseignement classique et secondaire.
Denis Plante
Archiviste
Sources: «Deux nouvelles facultés: la F.E.S., la F.A.S. Pourquoi?», Université de Montréal, chartes de 1920, 1950 et 1967; Université de Montréal, statuts de 1967, article 27.01; Les structures: rapport du Comité de développement académique sur les structures, juin 1969 et juin 1970; Claude Galarneau, Les collèges classiques au Canada français, Montréal, Éditions Fides, 1978, 287 p.
P.-S. La rédaction de cette chronique a été rendue possible par la consultation des archives de l’Université de Montréal. Aidez-nous à constituer cette mémoire institutionnelle au moyen des programmes de gestion des documents mis en place par la Division des archives. Renseignements: www.archiv.umontreal.ca.