À 51 ans, Donald Francœur s’apprête à vivre le choc culturel de sa vie. Passionné de culture chinoise, cet avocat d’un grand cabinet de Montréal s’est inscrit à un stage d’été organisé par la Faculté de droit qui aura lieu du 13 mai au 7 juin prochains. Ce sera son premier séjour en Chine, mais il l’a préparé soigneusement, allant jusqu’à apprendre le mandarin. «J’espère être en mesure de soutenir une conversation au moment des Olympiques de Beijing, en 2008, mais je me donne 30 ans pour maîtriser la langue», lance-t-il.
Lorsque Me Francœur a pris connaissance du contenu du stage offert à des étudiants en droit et à des juristes de profession, il n’a pas hésité à s’inscrire. «C’était exactement ce que je cherchais», affirme-t-il. Le stage inclut des rencontres avec des juges et avocats chinois et des avocats et représentants canadiens travaillant en Chine. Après leurs cours, le matin, les participants seront invités à visiter des cabinets d’avocats et d’aide juridique. Ils pourront aussi assister à un procès criminel.
Comme la soixantaine de stagiaires qui se rendront dans la capitale chinoise, Me Francœur s’est engagé à rédiger un rapport de stage et à faire les travaux que les professeurs exigeront des étudiants. Mais les juristes en exercice comme lui sont l’exception. Pour sa part, Julie Girard, étudiante au baccalauréat en deuxième année, a voulu saisir l’occasion de découvrir un système juridique totalement différent de celui que l’on connaît de ce côté-ci de l’hémisphère. «C’est emballant de pouvoir être en contact avec une culture si éloignée de la nôtre et un système juridique aux traditions et aux philosophies différentes», estime Mme Girard.
Pour Étienne Michaud, qui rédige actuellement une maîtrise en droit des technologies, le stage estival permettra un premier contact avec la culture juridique de ce pays gigantesque. Après avoir travaillé pendant plusieurs mois à l’Organisation des Nations Unies, à Genève, le jeune homme a eu la piqûre pour les relations internationales. Le fait d’avoir été mis en contact avec plusieurs systèmes juridiques lui a donné envie d’en connaître plus. «Je n’ai aucune idée de l’impact qu’aura ce stage sur ma carrière, concède-t-il. Mais je ne voulais pas manquer l’occasion de plonger dans cette réalité.»
Le stage d’été en Chine, une première à la Faculté de droit, a remporté un succès immédiat en dépit de son coût élevé (3500 $ excluant le billet d’avion; 1000 $ de plus pour les professionnels). Il donnera accès à six crédits de cours au premier ou au deuxième cycle. De plus, un certificat sera délivré par la China University of Political Sciences and Law, un partenaire du projet.
Le 21e siècle sera chinois
Ce stage a été mis sur pied par le doyen de la Faculté, Jacques Frémont, qui entretient depuis 20 ans des contacts avec les universitaires chinois. M. Frémont est à l’origine, notamment, d’un programme inédit de formation des juges chinois entamé en 1998. «La Chine a un système de droit civiliste. Or, après un régime communiste qui visait en quelque sorte une situation d’absence de droit, la Chine connaît actuellement une formidable révolution juridique.»
Les Occidentaux ont une image négative du droit chinois à cause de son mépris apparent pour les droits de la personne et du recours très fréquent à la peine capitale. Pour M. Frémont, la participation d’étrangers à la réforme en cours est d’autant plus justifiée.
Pour Me Francœur, les entreprises canadiennes — y compris les cabinets d’avocats — peuvent saisir des occasions professionnelles exceptionnelles dans un marché de 1,25 milliard de personnes qui se montre ouvert aux investissements étrangers. Mais c’est d’abord sa curiosité personnelle qui l’attire en Orient. «Le 19e siècle a été l’affaire de l’Europe, le 20e de l’Amérique. Le 21e sera celle de la Chine», dit-il.
En tout cas, les inscriptions au stage d’un mois ont été nombreuses. «On espérait une vingtaine de stagiaires. À ce jour, une soixantaine se sont inscrits», mentionne M. Frémont.
Mathieu-Robert Sauvé