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Les branches de saule ont tellement poussé qu’on arrive difficilement à apercevoir la structure de bois qui a servi de matrice au «mur végétalisé» il y a quatre mois. |
Le long de l’autoroute 116 dans l’arrondissement Saint-Bruno à Longueuil, un scientifique regarde avec satisfaction le mur antibruit érigé au printemps. Tout s’est déroulé comme prévu: en quatre mois, le mur est passé de deux à trois mètres de hauteur. Le chercheur n’a pas découvert un nouveau matériau ayant la faculté de croître; il est botaniste, et le mur n’est pas dur comme du béton mais composé de quelques bouts de bois, de terre et surtout de boutures de saules. Une première au Québec.
Michel Labrecque est chef de la division Recherche et développement scientifique du Jardin botanique de Montréal et chercheur à l’Institut de recherche en biologie végétale. Ce spécialiste de l’écophysiologie des arbres travaille depuis une quinzaine d’années sur le saule, une espèce à croissance rapide qu’il a notamment utilisée pour la production de biomasse et la décontamination de sols.
Le botaniste est le responsable scientifique de la mise en place du premier «mur végétalisé» du Québec par la firme ontarienne d’ingénieurs Living Wall. Inventé il y a une vingtaine d’années en Allemagne et implanté dans quelques villes du sud de l’Ontario, ce mur vivant représente une solution de rechange écologique aux murs antibruit en béton. Michel Labrecque affirme que, en plus de ses indéniables qualités acoustiques et esthétiques, il offre un potentiel de dépollution atmosphérique par la captation de CO2.
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Le premier «mur végétalisé» du Québec fera certainement des petits. |
Son équipe, qui a fourni les quelque 2000 boutures nécessaires à la construction du mur de 30 mètres de longueur, étudie présentement la physiologie des plants de saules qui s’enracinent dans le mur et dans le sol et qui produisent des tiges autour et au-dessus de la structure du mur maintenant impossible à discerner.
«La reprise du mur est excellente, signale le botaniste. Il faut maintenant espérer qu’il survive aux sels de déglaçage et à la rigueur de notre hiver. Notre mur est le plus nordique des murs en fonction. On sait par expérience qu’il conserve ses propriétés acoustiques même lorsqu’il est dénudé. La masse de terre et de branches en dormance possède une plus grande capacité antibruit que les murs en béton, reconnus pour produire beaucoup de résonance.»
Il faudra donc attendre le printemps prochain pour savoir si, comme le souhaite Michel Labrecque, les «murs végétalisés» pousseront le long d’autres autoroutes du Québec.
Denis Lauzer
Collaboration spéciale