Édition du 17 avril 2003
 
  Pas d'urgence à aller à l'urgence
En pédiatrie, trois cas sur quatre traités à l'urgence ne sont pas urgents.

De plus en plus d'enfants se présentent avec leurs parents dans les urgences de nos hôpitaux depuis trois ans. L'an dernier, par exemple, il y a eu en moyenne 178 consultations par jour à l'hôpital Sainte-Justine. Selon le médecin en chef de la salle d'urgence, la Dre Sylvie Bergeron, trois cas sur quatre sont considérés comme «non urgents».

Mais qui consulter et où aller quand bébé fait de la fièvre depuis 48 heures et qu'au bout du fil l'infirmière d'Info-santé conseille fortement «de le faire voir par un médecin»? À la clinique sans rendez-vous ou à l'urgence? «Il faut éduquer la population à aller au bon endroit, affirme Mme Bergeron. La majorité des parents estiment que la condition médicale de leur enfant est de nature sérieuse même si elle n'est pas "prioritaire" selon le protocole de triage en vigueur dans les milieux médicaux.»

Mme Bergeron et quatre autres chercheurs du Groupe de recherche interdisciplinaire en santé de l'Université de Montréal présenteront les résultats de leurs travaux en juin, à Calgary, à l'occasion du colloque annuel de la Société canadienne de pédiatrie. L'équipe a voulu mieux comprendre les raisons qui incitent les parents à consulter les médecins de première ligne de l'hôpital Sainte-Justine. Les perceptions des pères et des mères quant à la sévérité des maux de leur progéniture ont aussi été étudiées dans cette recherche clinique, qui s'est déroulée le jour, en soirée et la nuit durant trois semaines consécutives au mois de mars.

Apaiser les craintes des parents
Les chercheurs ont mené l'enquête auprès de 135 répondants, dont trois mères sur quatre. Les enfants étaient âgés en moyenne de cinq ans et le nombre de visites à l'urgence avait varié de quatre à six au cours des six derniers mois. Les résultats révèlent que plus de 70 % des répondants consultent soit un pédiatre, soit un médecin de famille, mais 16 % d'entre eux ont de la difficulté à obtenir rapidement un rendez-vous. Ils se rendent donc une fois sur deux à l'hôpital Sainte-Justine ou, dans une proportion plus faible (29 %), dans un CLSC.

«La durée du temps d'attente et l'emplacement du centre hospitalier ne semblent pas influer sur leur décision. Cependant, le fait que leur petit soit vu par un pédiatre, perçu comme "le spécialiste des maladies infantiles", représente un facteur important à leurs yeux. Plus de 60 % des parents affirment qu'ils iraient dans un autre hôpital ou dans un CLSC si leur enfant pouvait être traité par un tel spécialiste», rapporte Mme Bergeron.

Les parents fréquentent l'urgence de l'hôpital Sainte-Justine pour différentes autres raisons: 41 % des répondants reconnaissent que les cliniques d'urgence de pédiatrie sont spécialisées dans les soins pour les enfants; 11 % soulignent les bons services reçus par le passé et 6 % apprécient la proximité du lieu. Avant de se rendre à l'hôpital, environ 80 % des parents avaient jugé que leur enfant avait besoin de soins de première ligne et près de 50 % avaient peur de voir son état de santé s'aggraver. La consultation auprès d'un médecin a eu pour effet d'atténuer leur stress. L'enfant était malade depuis moins de 24 heures dans 40 % des cas, alors que les autres présentaient des symptômes depuis cinq jours et plus.

Selon la Dre Sylvie Bergeron, il est impératif de «développer une confiance parentale à l'égard des médecins de famille, qui sont davantage en mesure d'offrir un suivi et des conseils à propos des cas fréquents de pédiatrie». L'attente à l'urgence imposée aux parents, où qu'ils aillent, démontre «qu'on n'a pas les ressources pour traiter tous azimuts».

Dominique Nancy

 



 
Archives | Communiqués | Pour nous joindre | Calendrier des événements
Université de Montréal, Direction des communications et du recrutement