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Le professeur Robert David, en compagnie de son collègue Jean Duhaime, indique où se trouve la mention de la maison de David sur la stèle de Tel Dan. |
Plusieurs des plus importantes découvertes archéologiques de notre temps sont dues à l’archéologie biblique. Et parmi ces découvertes majeures figurent une série de parchemins connus sous le nom de «manuscrits de la mer Morte», mis au jour entre 1947 et 1956 dans des grottes près des ruines de Qumrân, en Judée.
Des fragments de ces célèbres manuscrits font partie de l’exposition actuellement présentée au Musée d’archéologie et d’histoire de Montréal Pointe-à-Callière, L’archéologie et la Bible: du roi David aux manuscrits de la mer Morte. Deux professeurs de la Faculté de théologie, Jean Duhaime et Robert David, le premier reconnu comme un spécialiste des manuscrits et le second professeur d’archéologie et d’exégèse, ont contribué à l’organisation de cette exposition en tant que membres du comité scientifique.
«Cette exposition permet au public de s’approprier un patrimoine culturel, historique et religieux, indique Jean Duhaime. Connaître davantage ce patrimoine permet de mieux se positionner quant aux questions qu’il soulève.»
Les deux professeurs ont à la fois alimenté les concepteurs avec de l’information de base traitant de la période couverte et participé à la sélection et à la présentation des pièces. Les fragments de manuscrits constituent la pièce maîtresse de cette exposition, mais ils n’en sont pas le thème central. L’exposition couvre en fait une période de plus de 1000 ans, qui va du roi David (10e siècle avant notre ère) jusqu’à la destruction du second temple de Jérusalem, en l’an 70 de notre ère. L’exposition comprend une centaine de pièces, dont trois fragments de manuscrits exposés pour la première fois en dehors d’Israël.
Les plus vieux manuscrits bibliques
Les manuscrits de la mer Morte comprennent environ 950 parchemins. Les principaux, ceux de Qumrân, sont attribués à une secte rigoriste, probablement des esséniens, et incluent des portions de tous les livres de la Bible hébraïque, certains en entier. Ils ont été copiés entre le premier siècle avant notre ère et le premier siècle de notre ère.
«Ce sont les plus vieux manuscrits connus de la Bible, souligne Jean Duhaime. Ceux qui les ont copiés étudiaient la loi de Moïse, qu’ils voulaient appliquer à la lettre.»
Les trois fragments exposés proviennent de manuscrits connus sous les titres La guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres, La règle de la communauté et le Livre d’Isaïe. «Ces trois échantillons donnent un bon aperçu du corpus de Qumrân, poursuit le professeur. Ils comprennent un livre biblique — dont on peut comparer plusieurs versions —, un document apocalyptique de l’époque des Maccabées [celui sur la guerre] et la règle de vie de la communauté, qui permet de comprendre la mission que s’était donnée la secte.»
L’ensemble nous apprend également qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil: la secte était convaincue qu’elle était la seule détentrice de la vérité, qu’elle avait Dieu de son côté, que la société était corrompue et qu’il fallait se préparer au combat final contre les forces du mal.
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L'une des jarres dans lesquelles certains parchemins ont été retrouvés. |
Outre ces manuscrits, l’exposition présente une autre pièce unique qui vaut elle aussi le déplacement: la stèle de Tel Dan. On peut lire sur cette pierre, découverte en 1993 et datant du 9e siècle avant notre ère, l’unique mention de la dynastie de David en dehors des textes bibliques.
Pour plusieurs historiens, David, le roi au lance-pierre, relevait de la légende puisqu’on n’avait jamais retrouvé de traces de son règne ni de mention de son existence ailleurs que dans la Bible. La stèle, qui raconte la victoire des Araméens sur 70 rois dont celui de la maison de David (événement également mentionné dans le Livre des Rois), apporte du crédit à l’historicité du berger devenu roi.
Fort du succès de cette exposition, le musée Pointe-à-Callière présente, depuis le 14 septembre, une série de sept conférences sur des thèmes relatifs à l’exposition. Quatre des conférenciers sont liés à l’Université de Montréal: Jean Duhaime fera le tour des trois manuscrits de l’exposition, Phyllis Lambert (Aménagement) traitera de la cohabitation des juifs, des chrétiens et des musulmans au Caire, Guy Couturier (Théologie) présentera la stèle de Tel Dan et Robert David fera le point sur la controverse autour des origines d’Israël.
L’exposition L’archéologie et la Bible se poursuit jusqu’au 2 novembre. Les pièces présentées sont prêtées par le Musée d’Israël, l’Israel Antiquities Authority, la Bibliothèque nationale du Canada et les Archives nationales du Canada.
Daniel Baril
Que disent les manuscrits de la mer Morte? |
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Tous ceux qui s’intéressent aux manuscrits de la mer Morte voudront lire le tout récent ouvrage de Lawrence H. Schiffman, Les manuscrits de la mer Morte et le judaïsme, traduit, annoté, préfacé et mis à jour par Jean Duhaime, professeur à la Faculté de théologie.
Il s’agit du premier ouvrage d’interprétation des fameux manuscrits destinés au grand public. Son intérêt se trouve décuplé du fait que l’auteur est de tradition juive et que les juifs n’ont eu accès aux manuscrits qu’à partir des années 90.
Alors que les premières interprétations apportées par les chercheurs chrétiens mettaient l’accent sur les liens entre les manuscrits et le christianisme, Lawrence H. Schiffman met en lumière les enseignements qu’on peut en tirer pour l’histoire du judaïsme.
«Les manuscrits ne nous disent rien sur les origines du christianisme, affirme Jean Duhaime. Ils nous donnent un aperçu du judaïsme au moment de la transition de la tradition biblique vers la tradition rabbinique, soit l’époque où le christianisme s’est développé.»
Si certains rapprochements peuvent être établis entre les textes chrétiens et ceux de la mer Morte, c’est surtout sur le plan du style. Dans les deux cas, on parle par exemple du "fils du Très-Haut" et de "béatitudes" pour décrire le chemin du salut, mais il s’agirait là d’une mode littéraire, selon le professeur Duhaime.
Quant aux liens possibles entre Jésus et la secte de Qumrân, cela tiendrait de la légende urbaine. «Rien ne permet d’affirmer que Jésus, Jean-Baptiste ou Paul fréquentaient Qumrân, déclare le théologien, même s’ils ont dû en connaître l’existence. Si Jean-Baptiste se retirait dans le désert, il retournait à ses disciples dans la société pour y exercer un rôle actif. Jésus voulait réformer le judaïsme, mais en retournant à l’esprit de la loi de Moïse. La secte de Qumrân prêchait le contraire: ses membres se retiraient dans le désert parce que la société était corrompue et ils cherchaient à appliquer la loi à la lettre.»
Jean Duhaime se félicite du fait que les manuscrits sont maintenant entièrement accessibles à tous ceux qui veulent y travailler. «Ces textes qui ont d’abord divisé les chrétiens et les juifs sont maintenant un objet de regroupement et de collaboration.»
D.B.
Lawrence H. Schiffman, Les manuscrits de la mer Morte et le judaïsme, Montréal, Fides, 2003, 250 p. |
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