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Basil Favis explique le procédé de fabrication du plastique végétal dans l’extrudeuse double vis. |
Une équipe de chercheurs dirigée par Basil Favis, professeur au Département de génie chimique de l’École Polytechnique, a réussi à produire un plastique constitué de 50 % d’amidon thermoplastique, une substance naturelle qu’on trouve dans la plupart des végétaux. La découverte, récemment brevetée, représente une avancée majeure pour l’environnement.
«Il s’agit d’un pas de plus vers le développement durable puisque l’amidon est une ressource renouvelable», souligne le professeur Favis, dont l’innovation découle d’une thèse de doctorat qu’a effectuée sous sa direction l’étudiant F.J. Rodriguez-Gonzalez, en collaboration avec un ancien professeur de l’École Polytechnique, Bruce Ramsay.
Les plastiques sont généralement fabriqués à partir de polymères synthétiques, explique Basil Favis. Les plus connus sont le polyéthylène, le polypropylène et le polystyrène. «Notre innovation tient au fait qu’on a réussi à mélanger un polymère synthétique, le polyéthylène, à un polymère naturel, l’amidon, pour concevoir un plastique doté des mêmes propriétés que celles du polyéthylène pur.»
Avec l’appui d’Univalor, une société de gestion qui commercialise les inventions des chercheurs de l’Université de Montréal, de ses écoles – Polytechnique et HEC Montréal – et de la plupart des centres hospitaliers affiliés, M. Favis travaille actuellement à la mise au point et à la commercialisation de ce plastique végétal dont le potentiel économique est considérable. «Imaginez, on produit chaque année plus de 67 millions de tonnes métriques de polyéthylène! Les alliages de polymères représentent pour leur part environ 30 % du marché des plastiques.»
Beau, bon, pas cher
Avec ses 20 ans d’expérience dans le domaine des matériaux élaborés à partir de polymères, Basil Favis a acquis une réputation internationale comme expert dans le contrôle de la morphologie et de l’interface des mélanges de polymères. «Tout un défi, confie-t-il, quand on sait que la majorité de ces mélanges sont comme l’huile et l’eau, incompatibles.»
Le procédé à l’origine de la découverte des chercheurs de l’École Polytechnique est pourtant simple, assure M. Favis. «Tout d’abord, dans des conditions précises de température, de pression et d’humidité, on transforme les granules d’amidon en amidon thermoplastique, ou TPS, lequel est sous forme liquide. On ajoute ensuite le polyéthylène à mi-chemin dans l’extrudeuse et on le mélange à l’amidon. Il est alors possible de contrôler la structure morphologique du TPS et de le rendre sphérique, fibrillaire ou entièrement interconnecté dans le mélange. C’est ainsi que ce nouveau plastique peut posséder les mêmes caractéristiques que le plastique traditionnel à un prix moindre, et ce, sans avoir recours à un promoteur d’adhésion.» De plus, lorsque le TPS est totalement interconnecté dans le mélange, il devient biodégradable.
Selon le chercheur, il s’agit d’un produit qui aura des retombées considérables. «Ce plastique est bon marché, de bonne qualité et fabriqué à partir d’une ressource renouvelable», rappelle-t-il.
Chef scientifique
Avec 150 articles publiés sur le contrôle de la morphologie, Basil Favis trouve très motivant de voir l’impact et l’applicabilité de ses résultats de recherche. Il avoue cependant être surtout passionné par la formation d’étudiants et le métier de chercheur. Il n’était donc pas question pour lui de quitter ses fonctions professorales pour assurer la direction de Cerestech, l’entreprise qu’il vient de lancer. «Je suis un universitaire. J’aime bien la recherche appliquée, mais je ne vivrais pas sans recherche fondamentale.»
C’est donc à titre de chef scientifique qu’il s’engage dans le devenir du plastique végétal.
Dominique Nancy