Édition du 29 mars 2004 / volume 38, numéro 26
 
  Bons placements… et bonnes actions
L’Université de Montréal s’engage dans l’investissement acceptable

Jean McNeil

Université de Montréal «soutient qu’une politique d’achat et de placement socialement responsable est une approche efficace pour appliquer les principes qu’elle défend», affirme un document approuvé en décembre 2002 par l’Assemblée universitaire et plus récemment par le Conseil de l’Université. En effet, avec un actif qui totalise quelque deux milliards de dollars provenant de la caisse de retraite et du fonds de dotation, l’Université veut en avoir pour son argent mais pas à n’importe quel prix.

«On exige des gestionnaires de portefeuille et des responsables des achats qu’ils prennent des décisions avantageuses sur le plan économique. Mais les cotisants sont de plus en plus exigeants quant à l’utilisation de ces fonds: ils ne veulent pas que leur argent serve à financer des entreprises peu respectueuses des droits de la personne ou de l’environnement», explique le président du Comité aviseur sur les achats et placements socialement responsables, Jean McNeil.

Jusqu’où sont-ils prêts à aller? C’est ce que les membres de ce comité veulent savoir. C’est pourquoi ils invitent les gens intéressés par cette question à venir en discuter au cours d’une grande consultation publique le 1er avril à l’heure du dîner. Autant les étudiants que les employés ou les retraités de l’UdeM sont les bienvenus. M. McNeil rappelle d’ailleurs que ce sont les représentants étudiants qui sont à l’origine de la création de son Comité puisqu’ils se sont adressés à l’Assemblée universitaire en 2001.

M. McNeil dit que cette rencontre sera l’occasion d’entamer un dialogue avec la communauté universitaire tout en expliquant le fonctionnement du Comité, qui a déjà tenu plusieurs réunions mensuelles et qui doit soumettre un rapport dans les prochains mois. «Nous sommes la voix des gens que nous représentons, mais ceux-ci doivent nous indiquer les voies à suivre», précise-t-il.

L’économiste de service

Rattaché depuis plus de 25 ans à la Faculté de l’aménagement après avoir été professeur à l’École des Hautes Études Commerciales pendant une décennie, M. McNeil possède une longue expérience de représentation dans les instances institutionnelles. Il a représenté pendant 10 ans les professeurs à l’Assemblée universitaire et siège depuis l’an dernier au Conseil de l’Université.

Formé en gestion et en économie, il dit en blaguant qu’il est «l’économiste de service dans une faculté interdisciplinaire». Mais du même souffle, il affirme qu’il ne faut pas s’étonner qu’un professeur de la Faculté de l’aménagement dirige un tel comité. «Nous formons ici des gens qui ont à cœur la protection de l’environnement et le développement durable», dit-il.

Toutefois l’investissement éthique a de nombreuses définitions qui varient considérablement selon les individus et même les cultures. Pour certains, il n’est pas question d’investir dans des compagnies de tabac ou d’alcool; pour d’autres, ce sont les sociétés pétrolières qui sont à proscrire.

Un courtier de Toronto, Michael Jantzi, a créé en 2000 un index souvent cité comme un exemple du genre au Canada. Dans sa liste des entreprises les plus «socialement acceptables» cotées en Bourse, on trouve plusieurs banques, des compagnies pétrolières (Pétro-Canada) et des multinationales dont la réputation n’est pas sans tache (Noranda, notamment). Mais cet indice tient compte de divers éléments dont les efforts fournis par l’entreprise pour améliorer son bilan environnemental ou social.

«Il existe plusieurs façons de faire de l’investissement responsable, souligne M. McNeil. C’est pourquoi nous avons besoin de connaître l’opinion de ceux que nous représentons. Quelles valeurs devons-nous défendre?»

À l’avant-garde au Québec

Selon Jean McNeil, l’Université de Montréal est à l’avant-garde parmi les universités francophones en matière d’investissement responsable. Mais au Canada, d’autres établissements comme McMaster ou Toronto ont entrepris une réflexion sur ce sujet depuis les années 90.

À son avis, le fait que l’UdeM a pris les choses en main n’a rien à voir avec le mauvais placement dans le Fonds Lancer Offshore. Depuis juin 2002, la caisse de retraite des employés de l’Université tente de retirer le capital confié à ce fonds dont les éléments d’actif sont gelés. Plus de 100 M$ seraient en jeu.

Outre M. McNeil, qui agit à titre de représentant du vice-recteur exécutif et au développement académique, les membres du Comité aviseur sont Philippe Bélanger (FAECUM), Normand Bélisle (AGEEFEP), Yves Cloutier (membre du Comité de retraite et représentant des cadres et professionnels), Louis Dumont (représentant des professeurs), Najib Laïrini (représentant des chargés de cours), Yves Lépine (membre du Comité de placement, professeur), Andrée Mayrand (responsable des placements, membre d’office) et Charles Normandin (représentant du personnel de soutien).

Mathieu-Robert Sauvé

«Quelles valeurs privilégier?», consultation publique le jeudi 1er avril, de 11 h 45 à 13 h, au Pavillon 3200 Jean-Brillant, local B-2245.



 
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