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Jacqueline Vischer a un parcours inusité combinant psychologie et architecture. |
La professeure de design d'intérieur à l'École de design industriel Jacqueline Vischer a remporté, en juin dernier, le prix carrière de l'Environmental Design Research Association (EDRA). L'EDRA regroupe des designers, des architectes et des psychologues spécialisés dans les liens entre l'environnement bâti et les comportements psychosociaux.
La professeure au parcours inusité a une double formation en psychologie et en architecture. Après des études de deuxième cycle en psychologie appliquée à l'ergonomie (Institute of Science and Technology, de la University of Wales), Jacqueline Vischer a poursuivi ses études de doctorat à l'Université de Californie, à Berkeley, en sciences sociales et architecture.
«Le design d'intérieur inclut tous les éléments de l'aménagement des lieux de travail, l'agencement des espaces, l'ergonomie, le confort, la décoration, en ayant comme préoccupation l'expérience qu'en font les usagers», explique la professeure, qui a dirigé le baccalauréat en design d'intérieur pendant quatre ans.
Transfert des connaissances
Jacqueline Vischer est en fait l'une des pionnières de cette discipline à la jonction du psychosocial et du design et qui a pris forme il y a une vingtaine d'années. «Il n'est pas toujours facile d'appliquer les connaissances de la psychologie du travail à l'architecture, reconnait-elle. Il faut que les architectes soient sensibilisés aux besoins humains et sociaux des usagers ou que le client veuille prendre en considération cette dimension.»
Le défaut d'en tenir compte n'est pas nécessairement une économie, comme on peut souvent le constater lorsqu'il faut réaménager des lieux de travail qui ne conviennent pas. «Quand les gens aiment leur aménagement, ils sont mieux disposés à l'égard de leur travail», affirme la designer.
Pour faciliter ce transfert de connaissances, Jacqueline Vischer a fondé, en 1990, l'agence de consultation Bâtiments en usage/Buildings in Use, avec des bureaux à Montréal et à Boston. Spécialisée en design de bureau et gestion d'espaces analysés sous l'angle du confort, l'agence a notamment comme clients de grandes entreprises telles que Bell Canada, la Standard Life, l'Université Harvard et le MIT ou encore la Banque mondiale.
La chercheuse a également créé, à l'École de design industriel, le Groupe de recherche sur les environnements de travail, qui a pour objectif d'alimenter la réflexion des chercheurs en design et de sensibiliser le milieu à l'importance de la relation personne-environnement. À l'aide d'un site Web interactif spécialisé sur les besoins en aménagement, le Groupe peut gérer des projets à distance.
Carrière productive
Les spécialistes de la discipline doivent aussi à Jacqueline Vischer plusieurs volumes déjà parus sur cette approche novatrice ainsi qu'un ouvrage collectif qui devrait sortir des presses sous peu, Assessing Building Performance, dont elle a assumé la direction et regroupant des contributions d'une quinzaine de professionnels de différents pays. Un autre volume en préparation est prévu pour le printemps prochain: Space and Status: Designing for the New Organisation. Il présentera les bases et la théorie de la psychologie de l'environnement de travail.
Jacqueline Vischer est entrée à l'Université de Montréal en 1990 à titre de chargée de cours et a obtenu un poste permanent en 1998. Du pays de Galles à la Californie en passant par Vancouver et Boston, elle a acquis une solide expertise dans son domaine d'intervention. La professeure a été en poste à Vancouver pendant 10 ans. Elle y a dirigé une première agence de consultation tout en étant associée à l'Université de la Colombie-Britannique, avant de s'installer à Ottawa, où elle a été pendant trois ans stagiaire au programme national d'évaluation des bâtiments. Elle a de plus été responsable d'un programme d'évaluation des bâtiments publics de l'État du Massachusetts.
La professeure Vischer donne également des cours d'été à l'Université Harvard pour les professeurs en design et en architecture.
Parlant un excellent français teinté d'un charmant accent british, Jacqueline Vischer est née dans un milieu où l'on cultivait l'amour des langues. Son père, d'origine suisse allemande, était un francophile et sa mère était une spécialiste des langues. Ses parents l'ont inscrite dans un lycée français à Londres. «C'est peut-être pour cette raison que je me sens à l'aise dans un milieu comme Montréal», confie-t-elle.
Lorsque Forum l'a rencontrée, elle était sur le point de partir pour l'Angleterre où, au cours d'une année sabbatique, elle réalisera un projet de recherche sur l'environnement construit et la santé à l'Université de Salford. Cette année de recherche pourrait se terminer en Australie en réponse à une invitation à collaborer aux recherches d'une équipe de chercheurs travaillant sur le confort des lieux de travail.
Daniel Baril