Édition du 27 septembre 2004 / volume 39, numéro 5
 
  capsule science
Le réchauffement climatique modifie-t-il les couleurs de l'automne?

La coloration des feuilles, dans les régions tempérées comme la nôtre, est due à la diminution de la lumière dans le ciel automnal. Comme le soleil se lève plus tard et se couche plus tôt que durant l'été, la photopériode est alors réduite. La chlorophylle, responsable de la couleur verte des feuilles, cesse d'être dominante dans le système circulatoire des végétaux et se voit graduellement supplantée par les pigments rouges, jaunes et orange.

«La surface des feuilles est couverte de capteurs qui leur permettent de piéger l'énergie solaire. Quand la photopériode décroît, un processus complexe qui prépare la plante à la prochaine saison s'enclenche. On dit que les arbres ³aoûtent²», explique Michel Labrecque, conservateur au Jardin botanique de Montréal et chercheur à l'Institut de recherche en biologie végétale.

À l'ouverture du Biodôme de Montréal, il y a 15 ans, le botaniste a participé à une mission très spéciale: reproduire dans l'ancien vélodrome un automne artificiel qui susciterait chez le randonneur la même émotion qu'une balade dans Lanaudière durant le festival des couleurs. Il fallait trouver le moyen de créer un paysage de carte postale à l'intérieur de la forêt laurentienne.

Succès mitigé. Les feuilles jaunissaient et les arbres aoûtaient, mais les rouges vifs, oranges brûlés et pourpres n'étaient pas au rendez-vous. «En contrôlant la photopériode par l'éclairage artificiel, on peut parvenir à imiter la nature. Mais comme la température ne peut pas descendre au-dessous de cinq degrés Celsius dans le Biodôme, le caractère spectaculaire de l'automne nous a échappé.»

La chute brutale de la température durant la nuit et les variations météorologiques incessantes en septembre et octobre seraient donc responsables des coloris impressionnants de l'automne québécois. «Tout cela n'est pas encore parfaitement bien compris, mais on sait que les automnes frais et secs créent les meilleures conditions pour les paysages exceptionnels», mentionne le botaniste.

En 2002, les journées chaudes et sèches se sont étirées jusqu'au mois de novembre, et l'hiver s'est installé presque d'un seul coup. Résultat: on a vu de la neige sur les parterres alors que les feuilles n'étaient pas encore toutes tombées. «J'ai même vu des lilas qui entamaient leur floraison de printemps», se souvient Michel Labrecque.

Pour les végétaux, cette situation est loin d'être idéale, car les bourgeons sont programmés pour s'ouvrir après l'hiver et non avant. S'ils se développent à la fin de l'automne, le gel peut les tuer. Dans l'arboretum du Jardin botanique, Michel Labrecque estime que de 5 à 10 % des arbres ont souffert de cette situation exceptionnelle il y a deux ans: mortalité, croissance de branches retardée ou stoppée, etc. Plusieurs horticulteurs ont appelé pour connaître les raisons de l'hécatombe survenue dans leurs jardins.

Avec le réchauffement climatique, on peut s'attendre à d'autres automnes comme celui de 2002, estime le spécialiste. Un automne où les couleurs ont été plus ternes qu'à l'habitude, semble-t-il. Mais, plus grave, cela correspond à un taux de mortalité plus grand chez les végétaux.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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