Édition du 15 novembre 2004 / volume 39, numéro 11
 
  La conférence Spry accueille le gourou des médias Graham Murdock
Pour l'instant, déplore le sociologue, le public est assimilé à un consommateur potentiel

Graham Murdock

Spécialiste international d'Internet, Graham Murdock n'est ni informaticien ni ingénieur, mais plutôt professeur en sociologie de la culture. «Internet fait déjà partie de notre réalité quotidienne, mais l'on ne réfléchit peut-être pas assez à son impact sur la radiodiffusion publique», dit ce «gourou des médias» qui mène des recherches sur le sujet depuis une quinzaine d'années et dont les ouvrages ont été traduits en 14 langues.

Le sociologue sera de passage à l'Université le 22 novembre pour parler de ses travaux sur les relations entre la radiodiffusion et Internet à l'occasion de la conférence commémorative Spry 2004, une conférence annuelle organisée conjointement par le Département de communication de l'UdeM et l'Université Simon Fraser. M. Murdock présentera alors divers exemples de ce «nouveau patrimoine numérique» à l'oeuvre et examinera ses possibilités de rayonnement futur.

Joint par Internet, le professeur Murdock, qui enseigne à l'Université Loughborough, au Royaume-Uni, a consenti à divulguer un peu du contenu de sa présentation. «Vous savez, à l'heure actuelle, l'accès à Internet est encore fortement inégal, affirme-t-il. Si nous pouvions combiner l'accès à Internet et la nouvelle technologie numérique à la télévision, cela augmenterait certainement l'accessibilité.»

Mais la croissance d'Internet procure aux radiodiffuseurs publics une «occasion sans précédent de renouveler leur projet stratégique, soit la mise en place d'un patrimoine culturel susceptible d'enrichir et d'approfondir le sentiment d'appartenance.»   Trois qualités intrinsèques d'Internet sont à la base de ce projet, rappelle le sociologue. La supériorité du signal numérique, comparativement au signal analogique, permet de faire circuler des contenus dans des formes et des modes inédits; la largeur de la bande offre une plus grande quantité de postes; et enfin, grâce à l'interactivité, l'utilisateur peut intervenir de façon plus spontanée dans les échanges.

Internet comporte aussi ses limites, mais Graham Murdock demeure confiant en misant sur l'appropriation progressive de cette technologie par les radiodiffuseurs publics. «Pour l'instant, déplore-t-il, le public est
assimilé à un consommateur potentiel et sert essentiellement des intérêts commerciaux.»

Digital commons

Selon M. Murdock, les radiodiffuseurs publics ne devraient pas être indépendants. Grâce à Internet, ils ont l'occasion de se transformer en archivistes potentiels de programmes et autres sources d'information culturelle. Cette approche, qu'il appelle digital commons, permettrait aux radiodiffuseurs publics de devenir des pôles d'attraction en donnant par exemple accès à des dictionnaires et des encyclopédies et en offrant «une fenêtre» sur d'autres institutions publiques, dont les gouvernements, les universités et les musées.

«Avec cette approche qui ne se veut pas biaisée par l'appât du gain, la programmation s'impose comme point d'entrée vers une panoplie d'autres ressources, activités et interactions. D'institutions isolées aux prises avec des difficultés, les radiodiffuseurs publics se changent en plaques tournantes au sein d'un réseau d'approvisionnement public à vocation culturelle», conclut M. Murdock.

Dominique Nancy



 
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