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Michel Brûlé |
Afin de souligner la contribution exceptionnelle de Claude Ryan à la société québécoise, l’Université organise, les 9 et 10 mars prochain, un colloque sur l’homme. Ou plutôt sur l’époque à laquelle il vécut. Intitulé «Ruptures et continuité de la société québécoise: trajectoires de Claude Ryan», l’activité réunira 19 participants issus des milieux universitaire, politique et médiatique.
«Il y a une étrange synchronie entre la vie de M. Ryan et les temps forts du Québec», commente Michel Brûlé, professeur retraité du Département de sociologie à qui les doyens de la Faculté des études supérieures (FES), Louis Maheu, et de la Faculté des arts et des sciences (FAS), Joseph Hubert, ont demandé de coordonner l’évènement. M. Ryan est mort le 9 février 2004. Il avait 79 ans.
«Il s’agira d’un colloque universitaire avec son appareil critique. Ce n’est pas un panégyrique. M. Ryan, qui d’ailleurs n’a jamais supporté aucune autorité, n’aurait pas aimé cela, précise M. Brûlé en entrevue. Nous avons fait appel à des universitaires mais aussi à des acteurs sociaux. Nous n’avons été ni frileux ni paroissiaux.»
Les discussions porteront sur différents pans de notre histoire récente au cours desquels Claude Ryan a joué un rôle remarqué. Né en 1925, il avait 20 ans lorsqu’il a pris la tête de l’Action catholique et 37 lorsqu’il s’est retrouvé directeur du quotidien Le Devoir. À 52 ans, il fait le saut en politique active et remplace Robert Bourassa à la tête du Parti libéral du Québec. Mais c’est sans doute au Devoir, comme analyste et commentateur, qu’il a eu le plus d’influence. «Il commençait à réfléchir lorsqu’il voyait du papier», selon un témoin qui l’a connu.
Un colloque à thèmes variés
Au premier jour du colloque, le 9 mars, les participants se demanderont d’abord si un fil conducteur relie la société québécoise de l’après-guerre à celle d’aujourd’hui. Les sociologues Guy Rocher et Joseph-Yvon Thériault, ainsi que l’ex-ministre Joseph Facal se partageront le micro. M. Rocher, professeur au Centre de recherche en droit public, s’attardera à «la tension toujours non résolue» entre le vent de nordaméricanisation et une identité québécoise singulière. Le ministre Pierre Pettigrew, qui a travaillé étroitement avec Claude Ryan, devrait s’adresser aux participants à un moment qui reste à déterminer.
Le lendemain, quatre discussions auront pour thèmes, respectivement, la montée du nationalisme, la portée et l’influence du commentaire politique, le référendum et la Constitution de même que la langue et le religieux. M. Ryan servira en quelque sorte de point de repère à toutes ces époques.
On se penchera aussi sur le poids qu’ont eu l’Action catholique et l’éducation des adultes, avec Michèle S. Jean, conseillère en développement de programmes à la FES, Pierre Juneau, ex-président de la Société Radio-Canada, et Martin Meunier, professeur de sociologie à l’Université d’Ottawa. Paul-A. Bélanger, directeur du Centre de recherche sur l’éducation permanente à l’Université du Québec à Montréal, présidera la séance.
La discussion sur la montée du nationalisme mettra en présence André Fortier, secrétaire adjoint à la réforme des institutions démocratiques (ministère du Conseil exécutif du gouvernement du Québec), Kenneth McRoberts, principal du Collège universitaire Glendon de l’Université York, et Denis Monière, professeur de science politique à l’UdeM. Bernard Descôteaux, directeur du Devoir, assumera la présidence de cette discussion.
«Il s’agira d’un colloque à thèmes multiples et variés où par exemple la Constitution et l’influence des médias seront traitées. Nous touchons à sept champs d’études et je crois qu’il y aura à boire et à manger pour tous», dit M. Brûlé. Les départements d’histoire, de sociologie, de communication et de science politique, de même que la Faculté de théologie et de sciences des religions, la Faculté de droit et la Faculté des sciences de l’éducation se retrouveront autour de la table. Les organisateurs espèrent que les étudiants – et pas seulement ceux du campus – seront intéressés par le colloque.
Sur le thème «La portée et l’influence du commentaire politique: comment savoir?», on pourra entendre Jean-Claude Leclerc, journaliste, Olivier Marcil, directeur de cabinet du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et aux Affaires autochtones, André Pratte, éditorialiste en chef de La Presse, et Guy Lachapelle, secrétaire général de l’Association internationale de science politique. Florian Sauvageau, journaliste et professeur à l’Université Laval, présidera la séance.
«L’éventail des gens que M. Ryan a côtoyés est très large et ses contacts étaient assez hétéroclites. Nous avons voulu respecter cela», indique M. Brûlé. Le comité scientifique qu’il préside est formé de Gérard Boismenu, directeur du Département de science politique, Claude Lessard, professeur en sciences de l’éducation, Solange Lefebvre, professeure en théologie et sciences des religions, Pierre Noreau, directeur du Centre de recherche en droit public (CRDP), Marc Raboy, titulaire de la Chaire Beaverbrook sur l’éthique, les médias et les communications à l’Université McGill et professeur au Département de communications de ce même établissement, Bernard Motulsky, directeur général des communications et du recrutement, et Monique Kirouac, adjointe au doyen de la FES.
Pour discuter de référendum et de Constitution, le comité a retenu Guy Laforest, professeur de science politique à l’Université Laval, Andrée Lajoie, professeure au CRDP, et Jean-Claude Rivest, sénateur. M. Noreau présidera les échanges.
Enfin un dernier débat portera sur la langue et le religieux afin de savoir s’ils sont toujours sacrés. Richard Bernier, directeur adjoint du Newman Catholic Center à l’Université McGill, Marc Levine, professeur d’histoire et directeur du Centre d’études politiques canado-américaines à l’Université du Wisconsin, et Jean-Philippe Warren, professeur de sociologie à l’Université Concordia, tenteront de répondre à cette question. La journaliste et biographe Hélène Pelletier-Baillargeon assurera la présidence de ce dernier débat.
Michèle Bazin présidera le colloque, ainsi que la première discussion.
Par ailleurs, et cela est exceptionnel, les textes de tous les conférenciers – environ 10 pages –, pourront être consultés à l’ouverture du colloque. C’est une nouvelle tendance de les présenter au public sur place plutôt que d’attendre six mois avant de les publier. «Je cours après les conférenciers», résumait M. Brûlé récemment.
L’Université n’écarte pas la possibilité d’organiser d’autres colloques sur le Québec si l’initiative du mois prochain se conclut par un succès. «Le colloque peut être vu comme un positionnement de l’Université dans le but de s’enraciner localement», observe Michel Brûlé.
Renseignements: <www.umontreal.ca/colloques/ryan>.
Paule des Rivières