Édition du 7 mars 2005 / volume 39, numéro 23
 
  Des chimistes du projet SEUR visitent une école d’un quartier défavorisé
Des étudiants donnent aux jeunes du secondaire un aperçu de la vie dans une université

La composition «chimique» de l’équipe du projet SEUR: Marc-André Landreville, Binana Madikama, Geneviève Boucher et Tomás Dorta

«C’est le meilleur cours de science que j’aie jamais eu de ma vie!» C’est ce qu’a déclaré un élève au chimiste Binana Madikama à la suite de la présentation qu’il a faite devant sa classe de l’école secondaire Antoine-de-Saint-Exupéry, à Saint-Léonard, en février dernier. «Les jeunes ont réagi avec beaucoup d’enthousiasme aux expériences», commente le diplômé de l’Université de Montréal en chimie et en toxicologie qui se consacre cet hiver à l’initiation scientifique des jeunes dans les écoles défavorisées de la région montréalaise.

Avec une équipe de moniteurs liés au projet de sensibilisation aux études universitaires et à la recherche (projet SEUR), il anime des ateliers d’une heure qui présentent la chimie de la façon la plus concrète qu’on puisse l’imaginer. En chimie environnementale, les écoliers analysent un sol contaminé; en chimie alimentaire, ils «changent de l’eau en vin»; et, en chimie pharmaceutique, ils explorent la composition d’une aspirine.

Mais ce qui obtient le plus de succès, c’est la fabrication d’une tige luminescente semblable à celles qu’on voit dans les fêtes techno. «Ça les impressionne beaucoup», dit le chimiste qui tient à souligner le travail de ses quatre collaborateurs, étudiants au Département de chimie: Nada Wazel, Chady Stephan (cycles supérieurs), Étienne Comtois et Jeff Tshibaka.

Collaboration en design industriel

Il y a assez de matériel dans cette mallette pour mener trois expériences en chimie.

Le programme L’Université au cœur du secondaire est un volet du projet SEUR, qui a pour activité principale d’inviter quelque 700 jeunes à venir s’initier à la vie universitaire sur le campus durant l’été au moyen de séjours d’immersion d’une semaine. «Ici, nous travaillons toute l’année, explique Geneviève Boucher, coordonnatrice du projet SEUR, dans les locaux du pavillon Roger-Gaudry. Une bonne partie de notre travail consiste à préparer les séjours d’immersion de l’été, mais, pendant l’automne et l’hiver, nous organisons des conférences, des visites dans les écoles et différentes présentations. Nous donnons ainsi aux jeunes du secondaire un aperçu de la vie dans une université, ce qui correspond à notre mandat.»

Afin de faciliter le transport du matériel, la coordonnatrice a chargé un professeur du Département de design industriel, Tomás Dorta, de mettre au point une caisse capable de contenir tout le nécessaire des démonstrations. «Nous avions des contraintes précises, explique l’étudiant choisi, Marc-André Landreville: la caisse devait pouvoir entrer dans le coffre d’une automobile et recevoir sept mallettes de présentation ainsi que le plateau de l’animateur.»

Le travail de l’étudiant, sous la supervision de M. Dorta, a duré un mois et a nécessité l’élaboration et la fabrication d’une série de porte-éprouvettes en plastique conçus par thermomoulage. De l’avis de tous, le produit du jeune homme satisfait aux exigences formulées, de sorte que l’étudiant devrait obtenir sans difficulté le crédit de cours prévu pour ce «travail dirigé». «Nous sommes ravis du résultat, d’autant plus que ce projet avait une valeur pédagogique», indique Geneviève Boucher.

Tomás Dorta affirme que la demande du projet SEUR concorde parfaitement avec la politique de son département, qui encourage les travaux pratiques et les stages en entreprise.

Aspirine 101

L’expérience que M. Madikama propose aux élèves en chimie pharmaceutique consiste en la comparaison de divers composés d’acétylsalicylique, le nom savant qu’on donne à l’aspirine. Après avoir résumé l’histoire étonnante de ce médicament découvert en 1899 mais dont on a élucidé scientifiquement le mécanisme d’action que sept décennies plus tard, l’animateur invite les participants à noter leurs observations sur un tableau comparatif. Quelles sont les différences de coloration qu’on peut constater entre l’aspirine commerciale, l’aspirine de synthèse, l’acide salicylique, l’aspirine non recristallisée et l’aspirine commerciale dissoute dans l’eau? C’est le défi qu’ils doivent relever.

Les élèves ne sont pas rentrés à la maison avec en mémoire la formule de l’expérience qu’ils venaient de réaliser (FeCl3 + 6ArOH = {Fe(Oar)6}H3 + 3HCl), mais plusieurs ont ainsi pu avoir un premier contact avec la chimie expérimentale.

«Je trouve important de permettre aux jeunes de se familiariser avec les études universitaires et la recherche», confiait à Forum en 2001 l’initiateur de ce projet, Louis Dumont, professeur au Département de pharmacologie de la Faculté de médecine. Le pharmacologue disait avoir un intérêt personnel pour le développement des études universitaires chez les jeunes de milieux défavorisés et lançait un appel à la communauté pour susciter la collaboration de ses collègues désireux de faire connaitre leur espace de travail. Ceux-ci ont répondu avec enthousiasme à cette invitation.

L’an dernier, le nombre d’élèves du secondaire venus vivre l’immersion en milieu universitaire a atteint les 750. On espère cet été dépasser ce chiffre. On prépare actuellement l’embauche des 15 moniteurs qui accompagneront ces jeunes durant les mois de juin, juillet et aout.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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