Édition du 18 avril 2005 / volume 39, numéro 28
 
  année internationale de la physique
La physique des particules: 100 ans d’unification

Caverne du détecteur ATLAS au Large Hadron Collider, au CERN (Genève). Plusieurs professeurs du Département de physique travaillent à  la planification et à la réalisation de l’expérience ATLAS.

Il y a 100 ans, Albert Einstein publiait une série d’articles déterminants à partir desquels allait se construire la physique telle qu’on la connait aujourd’hui, avec toutes les conséquences que l’on sait sur la science et la technologie modernes. En effet, au cours de cette «année miraculeuse», il jetait les bases de la physique quantique et de la théorie de la relativité, deux révolutions majeures en physique. Einstein, qui cherchait la simplicité dans l’explication des lois de la nature, a démontré dans sa théorie de la relativité que l’électricité et le magnétisme n’étaient pas issus de deux forces différentes comme on le croyait jusqu’alors, mais étaient en fait une seule et même force observée dans deux «référentiels» distincts. À la suite de cette «unification», on admettait donc l’existence de deux forces fondamentales: la force gravitationnelle et la force électromagnétique. Cependant, l’exploration du monde subatomique et les progrès de la mécanique quantique qui marquèrent le siècle passé ont révélé l’existence de deux autres forces fondamentales, soit la force forte ou nucléaire et la force faible (responsable de la désintégration de certaines particules, comme le neutron).

Le détecteur BaBar, une expérience à laquelle participent plusieurs chercheurs du Département de physique.

Parallèlement, on découvrait plusieurs particules élémentaires, ainsi que la structure en régissant l’organisation. Le proton et le neutron ne sont pas des particules élémentaires, mais ils sont en fait composés de quarks, lesquels sont soumis à tous les types de forces. Les leptons, un autre type de particules, ne sont soumis qu’aux forces électromagnétique, faible et gravitationnelle. Il y a trois générations (ou familles) de ces particules, des copies que seule la masse distingue. Dans la première famille se trouve l’électron (e-), un lepton de charge -1, ainsi que son partenaire, le neutrino (ne), de charge nulle. Il y a aussi les quarks u (up) et d (down), de charges +2/3 et -1/3, respectivement. Les deux autres familles de leptons sont poétiquement nommées m et nm d’une part, et t et nt d’autre part; les autres quarks sont désignés par les symboles c (charm), s (strange), t (top) et b (bottom ou beauty).

Dans la foulée des travaux d’Einstein, des générations de chercheurs en physique des particules ont tenté d’unifier les quatre forces, c’est-à-dire de construire un cadre mathématique décrivant complètement l’ensemble des forces et des particules de la nature. Un point tournant dans cette quête fut l’élaboration, par Glashow, Salam et Weinberg il y a 40 ans, d’un modèle unifiant les forces électromagnétique et faible en une force dite «électrofaible».

La désintégration d’un Z0 dans le détecteur ALEPH, au CERN, en 1991.

Le modèle a été vérifié en 1983 avec la découverte du boson Z0 – un autre type de particule élémentaire – au CERN, en Suisse. Le «modèle standard» incorpore maintenant cette description de la force électrofaible, ainsi qu’une description de la force forte. Ce modèle a été vérifié à maintes reprises: il ne fait plus de doute qu’il rend bien compte de toutes les observations effectuées à ce jour.

Malheureusement, le modèle standard n’est toujours qu’un modèle – et non une théorie fondamentale – et il ne dit rien au sujet de la gravité. Il n’explique pas pourquoi les particules sont réparties selon la structure observée ni ne fournit d’explications sur ce qui détermine leurs charges et leurs masses. Il ne dit pas non plus pourquoi il y en a trois familles. Et d’autres questions restent encore sans réponse. En fait, il y a une trentaine de paramètres arbitraires dans ce modèle.

Une théorie vraiment fondamentale inclurait toutes les forces, expliquerait la structure des particules et serait basée sur un nombre minimal de prémisses et de paramètres. La théorie ultime doit nécessairement pousser au-delà du modèle standard. La recherche de cette «nouvelle physique» est le travail principal de tous les chercheurs en physique des particules dans le monde, et notamment de ceux du Département de physique de l’Université.

Sur le plan expérimental, on construit des collisionneurs de très haute énergie afin de produire de nouvelles particules; du point de vue théorique, on examine différentes pistes mathématiques pouvant être incorporées dans une grande théorie unificatrice. Le domaine est présentement en pleine effervescence: les données actuelles des expériences BaBar (États-Unis) et Belle (Japon) révèlent les premiers indices de phénomènes qui ne sont pas pris en considération dans le modèle standard. Si elles sont vérifiées, ces observations pourraient donner de précieux indices sur l’allure de la nouvelle physique et, de là, mener à une théorie d’unification… dont Albert Einstein aurait certainement été fier!

David London
Professeur titulaire
Département de physique
Collaboration spéciale



 
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