Discipline issue de la nanotechnologie, qui désigne
la miniaturisation extrême d’un procédé
ou d’une technique (un nanomètre vaut un milliardième
de mètre), la nanopharmaceutique est axée
sur les dimensions infinitésimales des médicaments.
C’est le domaine de recherche de la chimiste Françoise
Winnik, qui dirige le Laboratoire des matériaux mous
et nanopharmaceutiques, créé en 2000
à l’Université de Montréal.
L’une des rares femmes au Québec à être
spécialisée en nanotechnologie, la professeure
Winnik s’intéresse particulièrement aux
moyens de transport des particules nanométriques,
c’est-à-dire à des enrobages de médicaments
constitués de matériaux mous. «Ces matériaux,
ce sont des polymères aux propriétés
presque miraculeuses, dit-elle. On y enferme les agents
thérapeutiques pour qu’ils voyagent efficacement
dans le corps jusqu’à la cible, par exemple
une tumeur cancéreuse, où ils déversent
leur produit.»
Son attirance pour ces polymères remonte au début
des années 90. Un intérêt mondial
s’était alors manifesté pour un type
de polymère, le poly-N-isopropylacrylamide, plus
communément nommé «pnipam», soluble
en eau froide mais non en eau chaude. Ce polymère
s’ouvre ou se referme suivant les changements de température
de l’eau, le point de rupture se situant autour de
31 °C. Prototype même du polymère
«intelligent», il a un riche potentiel dans
un milieu aqueux particulier : le corps humain.
«Pour pénétrer jusqu’à la
cible, on construit le polymère de façon spéciale,
c’est-à-dire qu’on le “décore”
en y greffant par exemple des substances huileuses, explique
la chimiste. Ces gras deviennent des moteurs d’agglomérats
et provoquent, par attractions naturelles, la transformation
de la longue molécule polymérique en une myriade
de fines gouttelettes nanométriques, chacune portant
quelques fractions du médicament.»
Dotés désormais d’une coque molle insoluble
dans le sang, et conjugués au comportement thermodynamique
d’ouverture ou de fermeture, ces fascinants polymères
acquièrent alors des propriétés inouïes
qui leur permettent, tels de petits sous-marins espions,
de voyager dans le corps sans subir de dégradations
et de franchir des membranes cellulaires qui étaient
auparavant imperméables à leur passage. Ces
polymères peuvent contenir des substances qui, à
la façon d’outils de reconnaissance, leur donnent
la capacité de cibler les cellules cancéreuses.
Françoise Winnik est un des rares professeurs à
enseigner à la fois la chimie et la pharmacie. «Ce
sont deux mondes très différents, explique-t-elle.
En chimie, on peut être uniquement préoccupé
par la dimension scientifique, tandis qu’en pharmacie
on doit tenir compte de l’humain. Les règles
du jeu diffèrent. Pour la chimiste des polymères
pure et dure que je suis depuis plus de 20 ans, cela ouvre
des horizons complètement neufs.»
Chercheuse : Françoise
Winnik
Téléphone : (514) 343-6123
Financement : Conseil de recherches en sciences naturelles
et en génie, Fonds de l’aide aux chercheurs,
American Chemical Society