Si elles sont bien entraînées sur les plans
intellectuel et moteur, les personnes âgées
peuvent limiter et même inverser le déclin
du vieillissement cognitif. C’est la conclusion à
laquelle est parvenu le psychologue Louis Bherer au terme
de ses études de doctorat à l’Université
de Montréal. «Le déclin cognitif pur
— “je vieillis donc j’ai la mémoire
qui flanche” — n’existe pas, explique
le jeune chercheur qui poursuit actuellement des études
postdoctorales au Beckman Institute de l’Université
de l’Illinois. Notre recherche démontre que
le vieillissement de l’attention n’est pas irréversible.»
Sans prétendre avoir découvert la fontaine
de Jouvence, Louis Bherer attribue des vertus rajeunissantes
aux exercices qui contribuent à garder la mémoire
et l’attention alertes. «Quand on soumet un
groupe de personnes âgées à des tests
destinés à évaluer leur attention,
elles obtiennent des résultats comparables aux jeunes
si elles ont été entraînées suffisamment,
affirme-t-il. Le seul déficit qu’elles présentent,
c’est face aux tâches nouvelles sous pression.»
Le psychologue a mené des expériences auprès
de groupes de 15 à 20 personnes de 65 ans et plus,
dont il a comparé les résultats avec ceux
de groupes similaires de sujets âgés de 20
à 30 ans. Il a placé les participants dans
différentes situations faisant appel à leur
capacité d’attention. À sa grande surprise,
ce sont les gens qui ont démontré les meilleures
stratégies de mémorisation et d’optimisation
de l’attention qui ont eu les plus forts résultats.
Si l’on amène les sujets à adopter ces
stratégies, ils en viennent presque à gommer
leur déclin cognitif. Lorsqu’ils aperçoivent
un feu de circulation jaune, les conducteurs doivent décider
s’ils continuent ou s’ils immobilisent leur
véhicule. Cette décision, fondée sur
l’anticipation du feu rouge, doit être quasi
instantanée. Si elle paraît simple de prime
abord, elle fait appel à plusieurs processus cognitifs.
La méthodologie exploitée par Louis Bherer
reprend à peu près les principes en cause
dans ce genre de décision. Placés devant un
écran d’ordinateur, les sujets de recherche
doivent détecter une image précédée
d’un son avertisseur. Leur temps de réaction
est enregistré à la milliseconde près.
L’analyse révèle que, dans un premier
temps, les personnes âgées obtiennent de moins
bons résultats que les sujets du groupe témoin.
Selon le chercheur, cette situation s’explique par
le fait que les gens âgés, en général,
«se préparent peu pour les événements
incertains». Toutefois, «une courte procédure
d’entraînement permet une amélioration
significative» de la performance tant pour la vitesse
d’exécution que pour la précision. Les
travaux de Louis Bherer ont été effectués
à l’Institut universitaire de gériatrie
de Montréal sous la direction de Sylvie Belleville,
professeure au Département de psychologie de l’Université
de Montréal et chercheuse au Groupe de recherche
en neuropsychologie expérimentale. Présenté
sous forme d’articles à paraître dans
des revues savantes (trois articles ont été
publiés et trois sont actuellement en révision),
le doctorat a été jugé par la Faculté
des études supérieures comme la meilleure
thèse de l’année 2001-2002 dans le domaine
des sciences sociales.
Chercheur : Louis Bherer
Téléphone : (217) 265-5141
Courriel : lbherer@uiuc.edu
Financement : Instituts de recherche en santé du
Canada, Beckman Institute for Advanced Science and Technology