Les motifs de départ des médecins formés
au Québec sont essentiellement liés aux conditions
de la pratique médicale, incluant tout ce qui touche
la rémunération. C’est ce qu’indique
Henriette Bilodeau, chercheuse au Groupe de recherche interdisciplinaire
en santé de la Faculté de médecine
de l'Université de Montréal. «Il est
important de réaliser que le revenu moyen des médecins
québécois est le plus bas actuellement du
Canada alors qu’il était l’un des plus
élevés au début des années 70»,
signale la chercheuse.
L'Institut canadien d'information sur la santé révèle
qu'entre 1996 et 2000 quelque 550 médecins ont quitté
le Québec pour pratiquer dans une autre province
canadienne ou à l'étranger, principalement
en sol américain. À ce chiffre s'ajoute, pour
la même période, un solde négatif de
- 371 pour ce qui est de la migration interprovinciale.
Puisque des provinces comme l'Ontario et la Colombie-Britannique
présentent des soldes migratoires interprovinciaux
largement positifs (+ 331 et + 609), l’équipe
de Mme Bilodeau s’est demandé ce qui poussait
les médecins québécois à boucler
leurs valises.
Une enquête a été menée auprès
de 1654 médecins. Selon L’émigration
des médecins québécois : motifs de
départ et de retour, 231 médecins avaient
établi leur pratique dans une autre province canadienne
; 267 autres étaient basés aux États-Unis
; 110 étaient revenus à la maison après
un séjour plus ou moins long aux États-Unis
ou ailleurs au Canada ; 1046, enfin, avaient toujours fait
carrière au Québec.
L'étude rapporte que les médecins ayant quitté
le Québec l’ont fait avant tout pour des raisons
professionnelles et contextuelles, 52,3 % évoquant,
comme motif principal, le revenu, 41,6 % la recherche d'un
milieu de travail stimulant et plus du tiers (35,2 %) la
disponibilité des ressources professionnelles nécessaires
aux soins des patients. Au chapitre des motifs contextuels,
55,9 % des répondants ont motivé leur départ
en soulignant le climat politique du Québec, 47,8
% en déplorant le taux d’imposition, tandis
que 32,7 % des médecins mentionnaient la politique
linguistique. Précisons que la portion des médecins
émigrants de cette recherche a été
recueillie sur une période de 15 ans.
En examinant les données, les chercheurs ont en outre
constaté une surreprésentation d’anglophones
parmi les médecins quittant le Québec. «Quarante-sept
pour cent de ceux qui partent sont des anglophones, alors
qu’on retrouve seulement 5 % d’anglophones chez
les médecins du Québec», indique Mme
Bilodeau. Toutefois, presque autant de francophones (44
%) que d’anglophones (47 %) quittent le Québec.
«Mais cette différence est quand même
significative», souligne la chercheuse. Cela dit,
57 % des médecins qui émigrent vers les États-Unis
ou les autres provinces canadiennes sont diplômés
de l’Université McGill, «même si
cette université ne forme en moyenne que le tiers
des diplômés par année». Enfin,
on dénombre presque trois spécialistes pour
un omnipraticien à l'intérieur des groupes
qui vont travailler dans une autre province canadienne et
chez nos voisins du Sud.
Chercheuse : Henriette Bilodeau
Téléphone : (514) 987-3000, poste 8390.
Groupe de recherche interdisciplinaire en santé :
(514) 343-6185
Financement : Programme national de recherche et de développement
en matière de santé (Santé Canada)