Volume 41 - numÉro 12 - 20 NOVEMBRE 2006
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Contrôle des insectes piqueurs: zoom sur le BTILe Réseau Biocontrôle organise un colloque sur l’insecticide biologique
Le 23 novembre, de 70 à 100 personnes sont attendues au Jardin botanique de Montréal pour parler d’un biopesticide sur lequel on fonde beaucoup d’espoirs: le Bacillus thuringiensis israelensis, communément appelé BTI. «Il s’agit d’une bactérie à l’effet insecticide élevé et spécifique contre les insectes piqueurs qui se développent dans les milieux aquatiques», explique Jean-Louis Schwartz, professeur au Département de physiologie et codirecteur (avec Raynald Laprade) du Réseau Biocontrôle. Selon eux, le BTI n’est pas assez connu au Canada et il était urgent de tenir une rencontre sur ce thème particulier. Jusqu’à l’apparition des premiers cas de virus du Nil occidental (VNO) au Canada, le BTI n’avait été utilisé que pour des besoins de confort: on aspergeait par exemple les marais et les plans d’eau dans les régions de forte villégiature où les moustiques et mouches noires se reproduisent, de façon à éviter aux estivants le désagrément des piqures. Les villes de Terrebonne et de Laval ont aussi adopté des programmes d’épandage. Mais le VNO s’est avéré un problème sérieux de santé publique. «Du jour au lendemain, on a dû s’attaquer à des zones urbaines et périurbaines pour limiter la propagation du virus. La campagne a très bien fonctionné, d’ailleurs», signale M. Schwartz. Même si de multiples études sur l’innocuité du BTI suggèrent que son emploi est sans danger pour la faune et les êtres humains, plusieurs personnes se posent des questions à son sujet. Le Réseau Biocontrôle, en collaboration avec la Chaire de recherche du Canada en biocontrôle, a donc décidé de réunir dans une même salle des chercheurs réputés, des fabricants de produits bactériens, des évaluateurs, des fonctionnaires, des utilisateurs et des groupes de protection des consommateurs et de l’environnement. Les conférenciers viennent du Canada et d’Europe. On veut présenter l’état des connaissances sur le BTI, le principe de précaution dans la gestion des risques environnementaux, l’innocuité du BTI, la règlementation et l’utilisation du BTI.
Des maladies subtropicales au Québec? Sans vouloir se faire alarmiste, le professeur Schwartz mentionne que le réchauffement climatique est susceptible d’ouvrir de nouveaux territoires aux insectes subtropicaux qui transportent des infections. «On voit apparaitre ces maladies dans des régions comme la Caroline du Sud et la vallée du Mississippi. Même le virus du Nil occidental, on ne croyait jamais, cinq ans plus tôt, qu’on en trouverait des traces au nord de la frontière.»
À ne pas confondre avec ses cousines BTK (qui s’attaque aux chenilles) et BTT (contre la «bibitte à patate»), très prisées en génie génétique, le BTI permet de remplacer avantageusement le DDT, qui a causé des ravages. «Le DDT s’était révélé une arme efficace dans la lutte antimoustique. On pensait avoir trouvé le remède idéal. Mais on a déchanté par la suite. Ce produit subsistait beaucoup trop longtemps dans la nature, atteignant la flore et la faune. Même les insectes devenaient plus résistants.» Homologués au Canada depuis 1982, les biopesticides à base de BTI pourraient être utilisés à plus large échelle. Mais il importe d’en savoir plus à leur sujet.
Un réseau performant L’objectif de ce réseau est d’élaborer une approche intégrée recourant à tous les agents biologiques possibles – insectes, invertébrés, bactéries, virus, champignons – pour maitriser de façon naturelle les ravageurs des cultures. «L’approche chimique tend à détruire tout insecte tandis que l’approche biologique y va de façon plus ciblée», précise M. Schwartz. Pour relever le défi de la lutte biologique, le Réseau travaille en collaboration avec une quarantaine de chercheurs d’un bout à l’autre du Canada – biologistes, biophysiciens, généticiens, écologistes, biochimistes, bactériologistes – établis dans 15 universités et 7 organismes gouvernementaux. Le Réseau, dont le siège social est situé à l’Université de Montréal, forme également des chercheurs postdoctoraux. Après s’être concentré sur la culture en serre et les pépinières, on veut étendre les activités de recherche aux industries agricole et forestière, qui dépensent chaque année 10 G$ en pesticides. L’équipe de Montréal, composée de MM. Schwartz et Laprade, ainsi que de Roland Brousseau et Luke Masson, du Conseil national de recherches du Canada, est reconnue internationalement comme le «Team Canada» de la recherche sur le BT. Au cours des 10 dernières années, les chercheurs d’ici ont publié une quarantaine d’articles scientifiques dans des revues prestigieuses comme le Journal of Biological Chemistry, le Journal of Applied and Environmental Microbiology et Biochemistry. Mathieu-Robert Sauvé |
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