Volume 41 - numÉro 28 - 23 avril 2007
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Mathieu Gaudet, étudiant en médecine et pianiste virtuoseL’étudiant a horreur de perdre son temps
Le Prélude no4 de Sergueï Rachmaninov, joué par Mathieu Gaudet au piano Fazioli de la Chapelle historique du Bon-Pasteur, résonne encore quand le musicien de 30 ans tend la main au journaliste de Forum. Avec son sac à dos et ses cheveux en bataille, il ne correspond pas à l’image classique du pianiste virtuose. C’est pourtant ce qu’il est, jouant Rachmaninov avec «un beau tempérament romantique, une articulation claire et une belle sonorité», comme l’a déjà écrit le critique musical de La Presse, Claude Gingras. Mais il est beaucoup plus que cela: apprenti chef d’orchestre et... étudiant en médecine. «Entre la médecine et la musique, mon cœur balance, avoue-t-il, mais je dois dire que ces jours-ci, c’est le piano qui m’occupe le plus.» C’est le moins qu’on puisse dire. Pour couronner son doctorat en interprétation, sous la direction de Paul Stewart, Mathieu Gaudet présentera l’intégrale des préludes du compositeur russe (au nombre de 24). Un défi gigantesque, d’autant plus qu’il a choisi de tout jouer de mémoire. Cette décision est encore plus surprenante quand on sait que Rachmaninov ne figure pas parmi les compositeurs qu’il affectionne le plus. «Pourquoi ce programme? Parce que c’était juste un peu trop difficile pour moi», lance-t-il, amusé. Il admet qu’il a appris à aimer le pianiste à force de travailler ses préludes, jusqu’à six heures par jour au cours des derniers mois. «Mathieu Gaudet est un fin musicien, dit son directeur de maitrise en direction d’orchestre, Jean-François Rivest. Il a une très grande capacité de travail et d’écoute. De plus, il possède des qualités humaines très précieuses pour un futur chef.» Le directeur artistique de l’Orchestre de l’Université de Montréal, qui l’avait invité comme soliste à jouer le Concerto no2 de Rachmaninov à la salle Claude-Champagne il y a trois ans, fait référence à son engagement humanitaire. Au sein du Comité d’action sociale internationale de la Faculté de médecine, Mathieu Gaudet a participé en 2004 à une mission dans l’ouest du Kenya. Pendant sept semaines, l’étudiant en médecine a ausculté et traité des centaines de patients qui se présentaient à la clinique de brousse et au dispensaire mis en place par les bénévoles canadiens. Il a aussi vacciné des enfants contre la malaria et d’autres maladies infectieuses. «Une expérience inoubliable. J’ai bien envie d’y retourner, d’ailleurs», mentionne-t-il. Né au Nouveau-Brunswick de parents québécois, Mathieu Gaudet a grandi dans la région de Rimouski, où sa famille, qui compte trois enfants, a déménagé dans les années 80. «J’ai commencé à pianoter à l’âge de cinq ans, mais c’est à l’adolescence que j’ai vraiment développé une passion pour mon instrument», relate-t-il. Sa carrière musicale est jalonnée de succès. En plus de gagner de nombreuses bourses, il décroche le premier prix au Concours de musique du Canada (1996 et 1997) et à d’autres concours internationaux, dont ceux de Baltimore (2000) et de Toronto (2001). Lorsqu’il étudiait au Conservatoire de musique de Rimouski, Mathieu Gaudet obtenait parallèlement d’excellents résultats en science. La médecine le tentait déjà, mais il a préféré miser sur la musique. Après trois ans à la prestigieuse école Peabody de l’Université Johns Hopkins sous la direction de Julian Martin, il est invité à s’inscrire au doctorat de l’école Juilliard, de New York. Mais il optera pour le Conservatoire royal de Toronto, à l’école de Glenn Gould. Son inscription à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal s’est faite après deux ans de réflexion. «J’hésitais à faire de la musique toute ma vie, souligne-t-il. J’avais besoin d’autre chose.» À sa troisième année de médecine, Mathieu Gaudet n’a aucun regret. «J’aime beaucoup ce que je fais. C’est incroyablement excitant. J’ai l’impression de lever le voile sur un immense champ à découvrir. Chaque jour, le champ s’agrandit.» L’étudiant affirme qu’il peut compter sur la collaboration de la Faculté de médecine pour arriver à concilier études et musique. Il a d’ailleurs décidé de prendre un congé sabbatique, l’an prochain, pour se consacrer à l’étude de la direction d’orchestre. Quand on exprime son étonnement devant une vie aussi remplie, il se montre surpris. «Je ne suis pas hyperactif, explique-t-il. J’ai seulement horreur de perdre mon temps. Je n’ai d’ailleurs pas de télévision chez moi.» Pour se divertir, Mathieu Gaudet aime partir en voyage sac au dos. Il a parcouru, à pied, plus de 1200 km sur l’Appalachian Trail, aux États-Unis, en 2002. Il a aussi arpenté les Rocheuses et les provinces maritimes durant des expéditions de plusieurs semaines. Que sera sa vie dans 10 ans? «Je me vois médecin de famille en campagne. Peut-être engagé dans des missions humanitaires à l’étranger. Mais je ferai toujours de la musique.» Mathieu-Robert Sauvé «24 préludes de Sergueï Rachmaninov», récital de fin de doctorat de Mathieu Gaudet, le 4 mai à 20 h 30 à la salle Claude-Champagne de la Faculté de musique, 220, avenue Vincent- d’Indy. L’entrée est libre. |
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