Volume 41 - numÉro 28 - 23 avril 2007
|
|
||||
L’essence et les sens de la mémoireLe 29e symposium international du GRSNC se penche sur la mémoire et ses mystères
Tout un défi attend les participants du 29e symposium international du Groupe de recherche sur le système nerveux central (GRSNC), qui se déroulera les 14 et 15 mai prochain: ils tenteront de cerner quelle est «l’essence de la mémoire», thème qui constitue l’un des 25 défis scientifiques des 25 prochaines années, selon le magazine Science. Le thème de la rencontre aurait pu tout aussi bien être «les sens de la mémoire», tellement cette faculté revêt de multiples facettes. On parle en effet de mémoire immédiate et de mémoire à long terme, de mémoire sensorielle et de mémoire émotive, de mémoire déclarative et de mémoire procédurale, de mémoire épisodique, de mémoire sémantique et de mémoire de travail, sans compter la mémoire défaillante! Ce que nous appelons «mémoire» est la trace laissée dans nos réseaux de neurones par nos expériences quotidiennes et nos apprentissages. «Chaque type de mémoire repose sur plusieurs processus relevant de plusieurs parties du cerveau et les mécanismes d’emmagasinage de l’information sont différents», souligne Jean-Claude Lacaille, professeur au Département de physiologie et l’un des organisateurs du symposium. La mémoire à court terme, par exemple, met à contribution le lobe préfrontal alors que la mémoire à long terme loge dans le cortex temporal et dans l’hippocampe. Quant à la mémoire procédurale, qui nous permet de nous rappeler comment faire de la bicyclette sans qu’on ait besoin d’y penser, elle est plutôt associée au cervelet et au cortex moteur. L’information peut en outre passer d’un centre à un autre. Le but du symposium est d’assurer l’échange des connaissances entre les différentes disciplines des neurosciences afin de faire le point sur où, quand et comment est encodée l’information à la base de la mémoire. La problématique sera abordée sous quatre angles d’analyse: les mécanismes moléculaires de la mémoire, la plasticité des connexions synaptiques, les modèles animaux et le comportement humain. Mémoire consciente et inconsciente La mémoire déclarative, ou explicite, est une composante de la mémoire à long terme; elle désigne le souvenir conscient des faits et des choses, soit toute information qu’on peut retrouver assez facilement. Mais ces souvenirs, même vifs, sont toujours des reconstructions: ils ne sont pas stockés comme des dossiers dans un ordinateur, mais procèdent d’une recombinaison d’éléments encodés dans diverses parties du cerveau. C’est pourquoi la mémoire nous joue souvent de vilains tours. Par ailleurs, si le rôle de la mémoire est de nous permettre de savoir ce qui est important pour assurer notre survie, il n’est pas nécessaire que toute information soit accessible à la conscience, fait valoir Jean-Claude Lacaille.
Plasticité et fixation Des dizaines de fois par seconde, les extrémités de nos neurones libèrent des neurotransmetteurs captés par les récepteurs des autres neurones. Comme l’ont montré les travaux de Vincent Castellucci, ces récepteurs sont en perpétuelle transformation. La quantité de neurotransmetteurs émis, la quantité de récepteurs produits et l’affinité entre les deux feront la différence entre un souvenir tenace et un oubli. La mémoire à long terme fait aussi intervenir d’autres processus. «Elle nécessite la production de protéines particulières dans l’hippocampe», précise Jean-Claude Lacaille. Ses travaux sur le sujet, qui révèlent comment ces protéines permettent de passer de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme, viennent d’être rapportés dans le numéro du 6 avril de la revue Cell. Vincent Castellucci a lui aussi contribué à l’avancement des connaissances sur les différents processus de mémorisation par ses travaux sur l’aplysie, un escargot de mer. «Il y a une grande unité dans les fonctions de mémorisation, que ce soit chez la drosophile, la souris, l’aplysie ou l’être humain, d’où l’utilité des modèles animaux, dit-il. La grammaire de base qui règle la transmission des messages est la même et son rôle est de nous permettre d’apprendre comment nous nourrir, qui sont nos ennemis et qui sont nos amis.» Évidemment, la capacité d’apprentissage de l’être humain est plus grande que celle de la drosophile. En plus d’assurer la survie, l’aspect conscient de la mémoire chez l’humain lui permet de transmettre son savoir aux autres. Selon le professeur Castellucci, cette habileté hautement développée aurait favorisé le succès évolutif de l’Homo sapiens, qui a survécu aux autres hominidés. Outre les professeurs Lacaille et Castellucci, Sylvie Belleville, du Département de psychologie, et Wayne Sossin, de l’Université McGill, ont participé à l’organisation du symposium. La rencontre est mise sur pied conjointement avec le groupe des Instituts de recherche en santé du Canada sur la transmission synaptique et la plasticité. Le programme peut être consulté sur le site <www.grsnc.umontreal.ca>. Daniel Baril |
Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.