Volume 41 - numÉro 29 - 7 mai 2007
|
|
|||
Un pèlerinage musicalLa soprano Suzie LeBlanc explore le répertoire de ses ancêtres acadiensAu moment où vous lisez ces lignes, la soprano Suzie LeBlanc marche seule sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle, dans le nord de l’Espagne. Avant de pratiquer le célèbre chemin foulé par des millions de chrétiens, elle a tenu à accomplir un autre type de pèlerinage. De Terre-Neuve à l’Île-du-Prince-Édouard en passant par le Nouveau-Brunswick, elle a récolté des chansons de ses ancêtres acadiens. La besace pleine, elle est entrée en studio pour enregistrer Tout passe : chants d’Acadie, la suite naturelle de son disque La mer jolie, paru en 2004, un premier hommage à la musique de sa terre natale. «J’avais besoin d’un temps de repos, explique la chargée de cours en chant baroque à la Faculté de musique, qui poursuit une brillante carrière internationale. Tout en m’entrainant en prévision des 800 km à parcourir vers Compostelle, je souhaitais m’arrêter chez les gens, prendre le thé, discuter et leur dire “Chantez-moi quelque chose…” Je voulais voir ce que ma présence leur inspirerait.» Et le disque s’est construit ainsi, au gré de ses pérégrinations. Retour aux sources Certaines pièces portent par ailleurs en elles une page d’histoire. Le manuscrit de La nouvelle chanson de Terre-Neuve, retrouvé en Normandie, dans le tiroir d’un bureau fermé à clé de 1725 à 1960, a sans doute été rédigé par plusieurs pêcheurs qui se sont aventurés dans la baie de Plaisance, réputée pour ses généreux bancs de morues. Et la chanson-titre du disque, Tout passe, aurait été l’un des trois cantiques chantés lors de la déportation des Acadiens, selon un historien du 18e siècle. Suzie LeBlanc a donc accompli un véritable retour aux sources, elle qui est issue d’une famille qui écoutait davantage de musique classique que traditionnelle. «Ce n’est pas quelque chose que j’avais exploré dans ma famille parce que ma mère est chanteuse classique, dit-elle. Mais, dès que je me rendais chez des amis ou des parents éloignés, j’entendais cette musique. C’est impossible d’être acadien et de ne pas avoir vécu plein de soirées dans la cuisine avec des violoneux. Ça fait partie de notre patrimoine, c’est dans notre sang.» Rompue aux mélodies du répertoire des 17e et 18e siècles, Suzie LeBlanc n’a pas eu à s’improviser chanteuse folklorique le temps de deux albums. «Ça m’inquiétait au début, car je croyais devoir chanter ces pièces de façon moderne. Puis, je me suis aperçue que je pouvais le faire à ma manière puisque les chants acadiens sont, comme le baroque, de la musique ancienne. La plupart proviennent d’Europe et ont été composés entre le 14e et le 17e siècle.»
À la recherche de soi Au cours de l’été, elle promènera les pièces de Tout passe dans les provinces maritimes. En septembre, la chanteuse s’aventurera en terrain inconnu, celui de Mozart, Fauré, Poulenc et Messiaen, mais assure du même souffle qu’elle ne délaisse pas ses premières amours, le baroque. Elle donnera d’ailleurs des concerts à Vancouver avec l’Académie baroque de Montréal prochainement. On doit à quelques-uns des membres de cet organisme (Marie-Nathalie Lacoursière, Alexander Weimann et Guillaume Bernardi) le succès de L’incorona-zione di Poppea, présenté au début du mois de mars par l’Atelier d’opéra et l’Atelier de musique baroque de l’UdeM. Suzie LeBlanc, qui y a supervisé les étudiants quant à l’apprentissage du style baroque, espère pouvoir recommencer d’ici 2009. La soprano s’amuse de la diversité de ses expériences qui, selon elle, n’en sont pas moins complémentaires. «Je prends beaucoup d’engagements, c’est vrai. Mais ce sont des choses auxquelles je réfléchis depuis deux ou trois ans. Elles ont pour objectif la recherche de soi, c’est-à-dire une connaissance plus profonde de moi comme interprète. Toutes mes expériences de vie s’intègrent ainsi à ma musique.» Marie Lambert-Chan |
Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.