Bulletin sur les recherches à l'Université de Montréal
 
Volume 6 - numÉro 1 - Septembre 2006
 Sommaire de ce numéro
 English version
 Archives

Épidémiologie

Les pompes contre l’asthme provoqueraient la carie

Les enfants asthmatiques qui utilisent des inhalateurs (Ventolin, Flovent et autres) pourraient courir 62 % plus de risques que les autres enfants d’avoir des caries avant l’âge de sept ans. C’est la conclusion d’une étude menée au Danemark en 2004. Mais l’échantillon ne comptait qu’une centaine d’enfants, ce qui rend les conclusions de la recherche difficiles à accepter sur le plan épidémiologique. « Plusieurs études ont été effectuées aux États-Unis et en Europe sur la question et elles présentent toutes des problèmes de méthodologie, fait remarquer Régis Blais, professeur au Département d’administration de la santé et chercheur au Groupe de recherche interdisciplinaire en santé (GRIS) de l’Université de Montréal. Nous voulons cette fois en avoir le cœur net. »

Responsable de la plus vaste étude entreprise à ce jour sur les liens entre les inhalateurs antiasthmatiques et la carie chez les enfants, le professeur Blais a pu accéder à des données concernant plusieurs milliers d’enfants asthmatiques âgés de zéro à neuf ans. À partir des dossiers médicaux de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), le chercheur pourra évaluer le lien entre la carie et l’utilisation des médicaments antiasthmatiques en aérosol. Il prévoit obtenir ses résultats avant la fin de l’année 2006.
C’est la nature publique du système de santé du Québec qui permet une telle collecte de données, grâce auxquelles Régis Blais étudiera les médicaments vendus sur ordonnance dans le cadre du régime public d’assurance médicaments – le nom du médicament, la posologie, l’âge des patients, la période de traitement, etc. – et les services dentaires gratuits assurés par la RAMQ. L’équipe de chercheurs, rattachée au GRIS, comprend le dentiste épidémiologiste Jean-Marc Brodeur, la professeure de pharmacie Claudine Laurier, la statisticienne Karen Leffondré, de l’Université de Montréal, et le dentiste chercheur Christophe Bedos, de l’Université McGill.

Le lien entre l’usage des médicaments en aérosol et la carie pourrait s’expliquer par trois facteurs. Premièrement, il est possible que les Ventolin, Flovent et autres ralentissent l’écoulement de la salive chez les utilisateurs réguliers de ces produits. Or, la salive est un nettoyeur naturel très efficace des dents. Deuxièmement, des études pharmaceutiques ont permis d’observer que le pH de la bouche était parfois modifié par ces médicaments, ce qui a pour effet de modifier également le taux d’acidité de la salive et par conséquent d’influer sur l’apparition de la carie. Enfin, la poudre sèche qui permet de transporter le médicament dans les poumons (par exemple pour le fluticasone) contient du lactose, substance qui pourrait nuire à la bonne santé des dents. « Ce ne sont là que des hypothèses, précise le chercheur. Notre étude ne vise pas à confirmer le mécanisme de cette hausse de la carie, si elle s’avère fondée. »

Les conclusions de l’équipe de chercheurs pourraient permettre de mieux cibler les campagnes de promotion de la santé dentaire. « Si l’on met au jour une corrélation positive, il faudra peut-être suggérer aux compagnies pharmaceutiques de concevoir un nouveau composé sans lactose pour transporter le médicament », lance Régis Blais. On pourrait aussi recommander que les jeunes asthmatiques fassent l’objet d’un suivi dentaire plus étroit ou qu’ils adoptent des pratiques d’hygiène buccale particulières afin de prévenir le développement des caries.

 

Chercheur :

Régis Blais

Courriel :

regis.blais@umontreal.ca

Téléphone :

514 343-5907

Financement :

Instituts de recherche en santé du Canada



Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.