Volume 6 - numÉro 1 - Septembre 2006
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CommunicationLe corps est un objet de désir... médiatiqueDe nos jours, des émissions de téléréalité telles Extreme Makeover (réseau ABC) ou The Swan (Fox) nous montrent des gens qui se font « refaire » une beauté en direct ; des augmentations mammaires sont offertes comme prix de présence dans des bars et les injections de botox contre les rides connaissent une progression fulgurante. Pourquoi la chirurgie esthétique est-elle devenue si populaire ? Voilà la question sur laquelle se penche Élisabeth Mercier, étudiante à la maitrise au Département de communication.
Dans son mémoire, intitulé « Les mises en marché et en discours de la chirurgie esthétique », l’étudiante traite la chirurgie comme un produit culturel auquel sont associés l’amour, l’estime de soi, la beauté, la richesse, valeurs dont les médias font d’ailleurs la promotion. Il faut souligner que la chirurgie esthétique, contrairement à d’autres spécialités médicales, fait énormément appel à la publicité, qu’elle diffuse dans des sites Internet, à la télévision et à la radio. Cette publicisation est précisément ce qui intéresse la chercheuse. En se basant entre autres sur l’émission américaine Extreme Makeover, le mémoire cherche à comprendre comment la chirurgie esthétique est mise en discours et en marché. Nous assistons à la « médicalisation de l’apparence physique », entérinée par des ouvrages scientifiques de chirurgie esthétique et qui repose sur les prétendues proportions idéales du corps. Dès lors, on nous propose la chirurgie comme une cure qui « soigne » le corps et du même coup qui rétablit la santé psychologique. « Lorsque des comportements conditionnés comme l’utilisation de la chirurgie esthétique deviennent ainsi inévitables, voire naturels, affirme la chercheuse, on en vient à se conformer à ces nouvelles normes sans même s’en apercevoir ». Le corps et tout ce qui s’y rapporte est devenu, selon Élisabeth Mercier, l’ultime retranchement où ce pouvoir s’exerce. « Dans une société de consommation, pour pousser les gens à consommer, il faut créer une insatisfaction permanente et une vulnérabilité émotionnelle qu’on cherche à combler à travers des pratiques normalisées. Aujourd’hui, en plus d’avoir investi notre intimité conjugale et sexuelle, ces pratiques assiègent notre intégrité physique. » Évidemment, la recherche d’Élisabeth Mercier est éminemment théorique. Son but est surtout de mettre en lumière un phénomène qui s’étend et sur lequel nous n’avons que trop peu réfléchi, peut-être par manque de recul. La chercheuse souhaite également sortir la chirurgie esthétique du simple débat qui veut qu’elle soit libératrice ou oppressante, mais plutôt l’inclure dans une réflexion interdisciplinaire qui engloberait par exemple la psychologie et la sociologie. Sa recherche est dirigée par Line Grenier, professeure agrégée au Département de communication et codirectrice du laboratoire Culture populaire, connaissances et critique. Bien qu’elle soit souvent méprisée par le milieu universitaire, la culture populaire recèle, selon Mme Mercier, de précieux renseignements sur notre société. « Ce qui m’intéresse particulièrement, indique la jeune chercheuse, c’est d’observer comment, dans notre vie de tous les jours, nous obéissons à certaines lois sans en prendre conscience. » C’est le cas de la chirurgie esthétique, qui, selon elle, n’a pas encore assez suscité de réflexions approfondies.
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