Volume 40 - numÉro 30 - 15 mai 2006 |
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Les effets secondaires liés au traitement de la leucémie infantile restent considérablesLe Centre de recherche du CHU Sainte-Justine reçoit une subvention d’IBM pour étudier les gènes modifiant la réponse au traitement
Il n’y a pas si longtemps, la leucémie infantile était fatale presque à tout coup. Aujourd’hui, 80% des enfants et des adolescents qui ont souffert de la maladie vivent encore cinq ans après le diagnostic. À l’origine de cette victoire... «Un traitement multiple, multimodal, comprenant chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie et médicaments», indique le Dr Daniel Sinnett, directeur de l’équipe en oncogénomique du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine, un des cinq hôpitaux du Québec spécialisés dans le traitement intensif de ce cancer. Selon le Dr Sinnett, aussi professeur à l’UdeM, cette avancée majeure ne doit pas donner une image biaisée de la réalité. «S’il est vrai qu’à l’heure actuelle la majorité des jeunes malades sont guéris à l’aide des traitements courants, les effets secondaires à long terme, même à l’âge adulte, sont considérables», dit-il. À ce jour, bien que les études sur le sujet ne soient pas encore terminées, on sait que les effets secondaires ne se limitent pas aux nausées, à la fatigue et à la perte des cheveux. Dans les trois quarts des cas, ils s’avèrent beaucoup plus graves. «Les problèmes cardiaques, d’inattention, de croissance et d’infertilité sont nombreux, déclare le Dr Sinnett. On craint aussi l’augmentation de cancers secondaires, introduits par le traitement.» On voit bien, dans un tel contexte, l’intérêt d’une nouvelle approche pour soigner ce mal qui est la cause la plus fréquente de décès par cancer chez les enfants de moins de 14 ans. Et c’est justement ce que propose le Dr Sinnett. Grâce à une subvention de la compagnie IBM d’une valeur de plus de un million de dollars, le biochimiste et son équipe poursuivront leurs travaux afin de découvrir les gènes qui modifient la réponse d’un patient au traitement. «Le but ultime est de diminuer les effets secondaires à long terme», mentionne le Dr Sinnett, l’un des principaux chercheurs dans le domaine au Canada. Vers une médecine personnaliséeDans 95% des cas, le cancer n’est pas héréditaire. Il est le résultat de mutations génétiques. «Dans ce type de cancer, dit sporadique, l’environnement joue un rôle, explique le Dr Sinnett. Par exemple, des sources cancérogènes comme la fumée de cigarette ou les pesticides peuvent causer des mutations. Mais nous ne réagissons pas tous de la même façon aux agressions du milieu dans lequel on vit. Il y a des profils génétiques qui sont plus vulnérables à la maladie.» Âgé de 42 ans, Daniel Sinnett a frappé un grand coup, en 1998, en démontrant que certaines formes des gènes CYP1A1 et GSTM1, enzymes du métabolisme des carcinogènes, prédisposent au développement de la leucémie lymphoblastique aigüe, la forme de leucémie la plus fréquente chez l’enfant. Près de 75% des jeunes atteints de leucémie en sont affectés, dont une plus grande proportion de garçons que de filles. Plus récemment, le titulaire de la chaire François-Karl-Viau, la seule chaire à se pencher sur les facteurs génétiques des cancers pédiatriques en Amérique du Nord, a réussi à isoler une région d’un chromosome humain qui comprend un gène suppresseur de tumeurs. ETV6, un des gènes de cette région compris dans la régulation de la transcription, serait absent chez un grand nombre d’enfants leucémiques. L’équipe du Dr Sinnett procède maintenant à une recherche intégrée sur l’ADN, l’ARN et les protéines afin de comprendre le rôle de ETV6 dans l’apparition de la leucémie. Les chercheurs espèrent ainsi mettre au point des outils de diagnostic et de traitement plus appropriés et plus efficaces pour les enfants aux prises avec la maladie (voir l’encadré ci-dessous). «Actuellement, notre compréhension des facteurs de susceptibilité génétique des maladies est très limitée, particulièrement en pédiatrie, signale le Dr Sinnett. Pour tirer pleinement parti des connaissances sur le génome humain, nous devons pouvoir traiter l’information d’une nouvelle façon et utiliser des technologies complexes. Avec le soutien d’IBM, nous serons en mesure de le faire.» Grâce aux technologies d’IBM, les chercheurs du CHU Sainte-Justine disposeront en effet d’une infrastructure intégrée pour analyser, filtrer et sélectionner les données cliniques engendrées par les systèmes, ce qui permettra d’éliminer une bonne partie des tâches manuelles de saisie et d’étude de ces données. Celles-ci seront fusionnées avec l’information génomique dans une seule base de données à laquelle les chercheurs auront directement accès. Le processus d’interrogation sera considérablement amélioré au moyen d’un outil qui fera passer le délai d’interrogation de plusieurs jours à quelques secondes. La subvention permettra également aux chercheurs du CHU Sainte-Justine de travailler avec des bio-informaticiens de premier plan du laboratoire de recherche T.-J.-Watson d’IBM. Dominique Nancy |
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