Anthropologie médicale
« Il faut vacciner plus d’enfants
africains ! »
Au Burkina Faso, seulement 52 % des enfants de
12 à 24 mois ont été vaccinés
contre au moins une des six maladies ciblées par
les grandes campagnes de vaccination : tuberculose,
polio, rougeole, coqueluche, tétanos et fièvre
jaune. À peine 32 % des enfants ont reçu
les six vaccins. Un taux en baisse compte tenu des objectifs
fixés par les autorités sanitaires pour
2004 : 80 % pour le vaccin BCG et 91 %
pour celui contre la fièvre jaune.
« Idéalement, l’objectif serait
de vacciner 100 % des enfants, signale Gilles Bibeau,
le responsable canadien d’une recherche-action
qui vise à hausser le taux de succès des
campagnes. Mais l’Afrique, c’est l’Afrique.
Les problèmes sont nombreux. Le fait qu’environ
un enfant sur deux naît à l'extérieur
des hôpitaux, souvent loin dans la brousse, ne
simplifie pas la tâche aux infirmiers et médecins
sur place. Sans parler des problèmes d’acheminement
du matériel. »
Au cours d’une de ses dernières visites
dans la région de Nouna, l’africaniste a
constaté que certains réfrigérateurs
de dispensaires étaient trop désuets pour
garantir la conservation des doses de vaccins, qui doivent être
gardées à une température comprise
entre zéro et quatre degrés Celsius. Quand
on pense que certains villages sont délestés
12 heures par jour afin d’économiser
les réserves d’énergie électrique,
on mesure bien l’ampleur des difficultés.
De plus, c’est souvent sur une mobylette que s’effectue
le transport des vaccins.
Selon M. Bibeau, qui enseigne l’anthropologie
médicale à l’Université de
Montréal et qui voyage régulièrement
en Afrique depuis trois décennies, ces problèmes
ne sont pourtant pas insurmontables et un protocole pourrait être
proposé dès l’année prochaine
afin d’améliorer l’efficacité des
programmes de prévention.
Son projet de recherche-action, qui vient d’obtenir
un financement de 500 000 $ de différents
organismes humanitaires, rassemble des chercheurs burkinabés
et canadiens. Le D r Florent Some, du Centre de
recherche en santé de Nouna, est le responsable
africain de l’étude, et les chercheurs sont
Aboubakary Sanou et Bocar Kouyate. Bruce Tapiero, de
l’Hôpital Sainte-Justine, est aussi engagé dans
le projet.
Il est bien fini le temps où les anthropologues
occidentaux s’opposaient aux campagnes de prévention
dans des pays en développement sous prétexte
qu’elles contaminaient la culture locale avec une
médecine moderne. « La vaccination
est une des découvertes les plus efficaces de
l’épidémiologie pour diminuer la
mortalité au sein d’une population, explique
M. Bibeau. Les mères à qui l'on suggère
la vaccination de leurs enfants sont presque toutes consentantes.
Malheureusement, en Afrique, plus de deux millions d’enfants
meurent annuellement faute d’avoir été vaccinés. »
Les travaux comporteront trois volets : la « recherche
sur le fonctionnement concret des services de vaccination »,
la « recherche sur les facteurs sociaux, économiques
et géographiques potentiellement associés
aux conduites des parents à l’égard
de la vaccination de leurs enfants » et la « recherche
d’anthropologie médicale sur les liens entre
les référents culturels des parents et
leurs conduites à l’égard de la vaccination ».
Chercheur : |
Gilles Bibeau |
Courriel : |
gilles.bibeau2@sympatico.ca |
Téléphone
: |
(514) 343-6593 |
Financement : |
Agence canadienne
de développement international |
|