Communications
Les punks de Montréal : attention aux étiquettes !
Martin Lussier n’a pas de pics dans les cheveux ni de mèches colorées. Aucun tatouage en vue non plus. Alors, au moins un perçage ? « Non, vraiment pas ! » s’amuse l’étudiant de troisième cycle en palpant son tee-shirt noir. Ainsi donc, l’ex-batteur des Marmottes aplaties ne correspond pas à l’image stéréotypée qu’on se fait des punks. Devenu étudiant au doctorat au Département de communication de l’Université de Montréal, Martin Lussier explore son milieu d’origine dans son mémoire de maîtrise sur les punks de Montréal.
Les premiers punks sont apparus à Montréal dans des salles de spectacle en 1978. Ils sont les héritiers du mouvement britannique issu de la classe ouvrière une décennie plus tôt, mais l’étudiant estime que les origines du mouvement pourraient remonter aux années 60. Les punks contestent le pouvoir, l’autorité, l’argent et la société de consommation. Plusieurs prônent l’autogestion et se réclament du slogan Do it yourself (« Fais-le toi-même »). Encore aujourd’hui, ce sont des anarchistes pacifistes qui rejettent la violence et s’opposent régulièrement aux valeurs nazies de certains skinheads. Nombre d'entre eux affichent un style reconnaissable : cheveux de couleur, perçages, bottes Doc Martens et pantalon de style militaire.
Toutefois, Martin Lussier s’inscrit en faux contre toute tentative de définition du mouvement. « Pourquoi s’obstiner à tracer un portrait des punks quand on ne fait que reproduire des stéréotypes ? demande-t-il. Il y en a, oui, qui prêchent l’anarchie, mais il y en a aussi qui n’ont pas d’opinion sur le sujet ou qui ignorent même la définition du mot “anarchie”… Même chose pour l'allure punk : tous ne l’arborent pas. »
Plusieurs, âgés de 18 à 21 ans, nettoient pour quelques pièces le pare-brise de votre voiture et trouvent dans cette activité un travail correspondant à leur quête d’indépendance. Ces laveurs de vitres d’automobiles partagent souvent la vie des jeunes de la rue. Encore là, Martin Lussier refuse d’associer le mouvement punk aux squeegees, même s’il reconnaît cette réalité. « Dans mon mémoire, je me suis plutôt attardé à la façon dont on a essayé d’instaurer une frontière permettant de délimiter ce qu’est le punk et la façon dont cette “réalité” nous apparaît. »
Si de visu le chercheur constate que la plupart des punks ont moins de 35 ans et qu’ils forment un groupe marginal dans la société, aucun chiffre ni aucune étude ne donnent de définition précise de cette population bigarrée. « Certains punks dorment dans les parcs, d’autres habitent chez leurs parents, d'autres encore ont même une mallette et le travail qui va avec », raconte le chercheur. Cependant, à Montréal, certains lieux et des organisations les rassemblent ou, du moins, les visent plus particulièrement : des salles de spectacle, des compagnies de disques, des réseaux informels de concerts, des médias. Au cœur de ces regroupements se trouvent une musique délibérément provocatrice et des concerts qui défient les règles établies : « Parfois, les musiciens ne sont pas très bons, ils crient plus qu’ils ne chantent, explique Martin Lussier, qui se classe lui-même parmi les plus mauvais. Par ailleurs, d’autres musiciens punks sont de fantastiques virtuoses de leur instrument : il y a des batteurs spectaculaires, des guitaristes surprenants, des chanteurs extrêmement talentueux. Il y en avait aussi des pires que moi… »
Chercheur : |
Martin Lussier |
Courriel : |
martin.lussier@umontreal.ca |
Téléphone : |
(514) 343-6111, poste 1-1464 |
Financement : |
Conseil de recherches en sciences humaines du Canada |
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