Sur les traces des légumineuses primitives
Malgré l'importance économique des légumineuses,
un pan entier de cette grande famille reste méconnu.
C'est pour lever le voile sur ces plantes qu'Anne Bruneau,
professeure à l'Institut de recherche en biologie
végétale de l'Université de Montréal,
vient d'obtenir des fonds de la National Science Foundation
(États-Unis). Elle terminera l'échantillonnage
et procédera à une classification plus
rigoureuse. Le tout se déroule dans un contexte
où la taxonomie, une science longtemps négligée,
reprend de la vigueur.
Les légumineuses comptent environ 18 000
espèces, divisées en trois sous-familles.
La première, celle des papilionoïdés,
comporte les plantes cultivées que nous connaissons
bien comme les pois, les haricots ou le soya. Dans la
deuxième, celle des mimosoïdés, se
rangent des arbres comme les acacias ou le mimosa. La
troisième, enfin, celle des caesalpinidés,
comprend quelque 2000 essences de grands arbres tropicaux
encore mal connues. C'est sur ces arbres que travaille
Anne Bruneau depuis près de 10 ans.
Du grand arbre tropical au petit pois, il y a une marge.
Pourtant, les fossiles végétaux confirment
que les caesalpinidés, apparus il y a près
de 100 millions d'années, sont les ancêtres
de toutes les légumineuses. Certains de ces arbres
sont aussi capables de fixer l'azote dans le sol, une
caractéristique qui fait une partie de l'intérêt
agricole des légumineuses et dont l'origine demeure
méconnue.
Les caesalpinidés poussent dans les forêts
humides d'Amérique du Sud, d'Afrique et d'Asie.
Dans le passé, les chercheurs ont travaillé indépendamment,
les Européens en Afrique et en Asie, les Américains
en Amérique du Sud. Résultat : des
espèces sont mal classifiées ou pas classifiées
du tout et certains genres ont été mis
dans des groupes à part de manière erronée.
Un vrai fouillis !
C'est pour reprendre cette classification sur des bases
plus rigoureuses que la National Science Foundation a
accordé 300 000 $ à Anne Bruneau et à ses
deux collègues, un paléobotaniste américain
de l'Université George Washington et un taxonomiste
anglais spécialiste des légumineuses. L'apport
de la chercheuse montréalaise réside principalement
dans son expertise en biologie moléculaire.
Le travail doit durer jusqu'en 2007. Bien que des chercheurs
hollandais aient constitué une collection de spécimens
représentatifs, Anne Bruneau et ses collègues
entendent retourner sur le terrain pour la compléter
et identifier de nouvelles espèces. Les trois
chercheurs se partageront donc des voyages d'un mois
vers des destinations exotiques : Madagascar, le
Brésil, l'Asie, l'Afrique de l'Est, le Venezuela… Travailler
dans la forêt humide n'est pas de tout repos. Le
déboisement massif des forêts tropicales
rend urgent ce travail de collecte et de classification. « En
raison de leur grande taille, ces arbres sont fréquemment
abattus, déplore la chercheuse. Nous n'aurons
plus longtemps la chance de les répertorier et
de mieux comprendre l'origine des légumineuses. »
Chercheuse : |
Anne Bruneau |
Courriel : |
bruneau@irbv.umontreal.ca |
Téléphone : |
(514) 872-7301 |
Financement : |
National Science Foundation |