Les consommateurs de produits culturels qui ont une faible
estime de soi lisent davantage les critiques de cinéma
que les gens dont l’estime de soi est plus forte.
Par conséquent, ces critiques influent davantage
sur leur décision d’aller voir ou non un film.
Voilà une des conclusions d’une étude
effectuée par Alain d’Astous et François
Colbert, deux chercheurs de HEC Montréal, sur la
lecture de critiques de films et son impact sur la consommation,
dont les résultats sont parus récemment dans
la revue Gestion (volume 28, numéro 1, printemps
2003). Cette étude révèle en outre
que, chez les cinéphiles, la lecture des critiques
est plutôt une façon de confronter leur point
de vue à celui d’une autre personne. Ceux
qui se décrivent comme des non-cinéphiles
s’en remettent beaucoup au jugement du spécialiste.
L’étude des chercheurs de HEC Montréal, école
affiliée à l’Université de Montréal,
est une des premières à tenter de faire la
lumière sur l’influence de la critique spécialisée
de cinéma sur le consommateur de produits culturels. « Dans
toutes les disciplines artistiques, peut-on lire en présentation,
on prête un pouvoir énorme à la critique,
celui de faire ou de défaire une opération
[de lancement] sur la base d’un simple article dans
le journal : on croit que les spectateurs potentiels n’attendent
que les critiques pour faire un choix éclairé.
Qu’en est-il exactement? »
Les chercheurs ont procédé à une enquête
auprès de 120 étudiants dont l’âge
correspond au public cible d’une bonne partie de
l’industrie cinématographique. Ceux-ci ont
eu à recommander ou à déconseiller
un long métrage à la suite de la lecture
d’une critique. Pour ce faire, les chercheurs ont
inventé 96 scénarios de films et mis au monde
six critiques de cinéma. Pourquoi s’être
basé sur des films et des critiques factices? « Pour
contrôler tous les paramètres, répond
M. d’Astous. Si l’on avait proposé des
films de Steven Spielberg ou des textes de critiques connus,
on aurait intégré des biais. »
La recherche a permis de révéler qu’il
s’établissait une relation particulière
entre la personne qui lit une critique et le signataire
de celle-ci. « La personne qui lit une critique de
cinéma va bien au-delà du texte publié,
explique Alain d’Astous, qui s’intéresse
depuis 15 ans à l’impact de la critique sur
la consommation de produits culturels. Le lecteur analyse
l’information transmise en tenant compte de la réputation
du critique, de celle du réalisateur, de la qualité des
acteurs, etc. De plus, il lit la critique avec les différentes
facettes de sa personnalité. »
Les grands succès cinématographiques des
derniers mois — Les invasions barbares, La grande
séduction, Hulk, The Matrix — ont été accompagnés
de campagnes publicitaires majeures. Mais ils ont aussi été présentés
par la critique comme de bons ou de mauvais films. L’article
de la revue Gestion présente le phénomène
de la critique de façon à permettre aux gestionnaires
d’atténuer les impacts négatifs d’une
critique défavorable ou de maximiser les retombées
d’une critique élogieuse.
Chercheurs : Alain d’Astous et François Colbert
Téléphone : (514) 340-6416; (514) 340-6827
Courriel : alain.dastous@hec.ca; francois.colbert@hec.ca